Publié le 05.12.2017

ITER Industry day : intervention de Frédérique Vidal

Frédérique Vidal s'est exprimée lundi 4 décembre 2017 à l'occasion de la journée autour de l'impact industriel d'ITER.

ITER industry day

Je veux tout d’abord remercier la commission européenne et vous-même cher Commissaire Arias Cañete pour leur soutien au projet ITER et l’organisation de cette journée autour de l’impact industriel d’ITER.

Le projet ITER est unique à bien des titres

C’est d’abord, bien sûr, la perspective de disposer au milieu de ce siècle d’une source d’énergie abondante, propre et sans gaz à effet de serre. Or, tout nous montre à quel point il nous faut et faudra trouver des solutions pour lutter contre le changement climatique. La COP23 présidée par les Iles Fidji et organisée à Bonn a mis en lumière de nouveau la dure réalité, déjà palpable, du changement climatique. Le One Planet Summit le 12 décembre à Paris, qui a été souhaité par le Président de la République française pour les deux ans de l’accord de Paris montrera, et c’est très important, que la mobilisation ne faiblit pas et que l’innovation fait partie des solutions. Faire émerger des innovations technologiques aussi ambitieuses que la Fusion nécessite de travailler sur le temps long.

Dans notre monde de l’instantané, les grands projets scientifiques internationaux, dont ITER est l’emblème, ont une double vertu. D’une part ils nous rappellent qu’il faut savoir investir sur les temps longs pour dépasser les frontières de la connaissance et de la technologie, et d’autre part ils agissent, par les coopérations internationales qu’ils créent,  comme un facteur stabilisateur, donc comme un facteur de paix :

  • La France accueille sur son sol plusieurs grands instruments scientifiques, comme l’ILL, l’E.S.R.F., le GANIL, le Laser Mégajoule, le CERN, des grandes machines de calcul, en se mobilisant au côté de la Commission et des pays partenaires au sein de Euro-H.P.C. pour viser l’exascale, et maintenant, ITER. Il est indéniable au regard de l’expérience tirée de ces grands instruments, que pour repousser les frontières de la science, il faut dépasser des limites de la technologie.  Ces grandes aventures scientifiques, sont porteuses d’innovation et permettent à l’industrie européenne de progresser et de devenir plus compétitive sur la scène mondiale. Elles permettent aussi d’utiliser les technologies produites au service d’autres champs scientifiques : à titre d’exemple, les technologies d’imagerie médicale par R.M.N. tirent maintenant parti des avancées mises au point pour le LHC au CERN et  pour la quête du boson de Higgs sur les aimants supraconducteurs et la cryogénie associée. Le projet ITER voit déjà émerger des ruptures technologiques  (en robotique, en matériaux,  en techniques de contrôle non destructif, ...). Ces ruptures auront, à n’en pas douter des utilisations au service de la science, et au-delà de la société,  au-delà du champ de la fusion.
  • Le rôle du CERN au service de la paix est bien connu. La volonté de sceller la fin de la guerre froide a contribué à la décision de lancer ITER. Les grandes collaborations internationales, et ITER est la plus grande avec 35 pays impliqués représentant 85% du PIB mondial et plus de 50% de la population mondiale, permettent aux scientifiques et industriels qui participent de vivre une expérience humaine unique et de mieux connaître, de mieux comprendre les diversités culturelles des pays participants.

ITER est enfin un projet industriel d’une ampleur inégalée en termes de premières industrielles. Sa durée prévue, 35 ans avec une extension possible de 10 ans supplémentaires, la large diversité des technologies fortement innovantes mises en œuvre, la taille et le nombre des composants à produire et assembler constituent une opportunité unique pour les entreprises sur deux plans : d’une part nouer des alliances dans le cadre d’un apprentissage de partenariats durables et d’autre part développer des standards communs leur permettant d’aborder ultérieurement le marché mondial dans les meilleures conditions

ITER est donc tout à la fois un projet scientifique, un projet de société et un projet industriel.

La France soutient fortement le projet ITER

La nouvelle équipe de direction, pilotée par M. Bernard BIGOT, a su remettre le projet sur le bon chemin.

Le calendrier a de la nouvelle "Reference Baseline" avec le 1er plasma Hydrogène en 2025, le 1er Plasma Deutérium-Tritium en 2035, apparaît comme le plus court possible et apparaît  comme tenable. L’objectif de procéder de manière graduelle dans la mise en service d’une machine d’une extraordinaire complexité relève d’une approche similaire à celle adopté par le CERN dans la mise en service et la montée en puissance de l’accélérateur LHC, dont on a pu voir tous les bienfaits.

10 ans après la création de l’Organisation internationale ITER et de l’agence européenne Fusion for Energy (F4E), le 21ème Conseil ITER qui vient de se tenir, confirme que le projet ITER est aujourd’hui sur une trajectoire soutenable. Depuis 2016, les 26 étapes (Project milestones) fixées par le Conseil ont été franchies dans le respect du calendrier global du programme. Dans les quelques cas où le franchissement d’une étape laissait anticiper un retard, des mesures compensatoires ont été prises pour respecter le calendrier conduisant au Premier Plasma en 2025.

La mention des 10 ans de Fusion for Energy me donne l’occasion de souligner la grande aventure commune européenne qui se bâtit autour d'ITER et de F4E. Celle-ci implique l’ensemble des pays membres d’Euratom, dont je tiens à saluer le rôle, chers Dominique Ristori et Gerassimos Thomas, ainsi que la Suisse qui s’est joint dès le début à cette aventure. Vingt Etats membres d’Euratom et la Suisse fournissent ainsi des composants de haut niveau à ITER.

La France remercie la Commission pour son action résolue au soutien du projet ITER et espère également que le Conseil de l’Union européenne approuvera la communication de la Commission sous la prochaine présidence Bulgare et que le Parlement européen donnera un signal clair de soutien politique au projet.  La France espère également que les processus de ratification continueront de progresser au sein de chacun des Etats membres d’ITER et que toutes les parties continueront à s’investir pleinement de façon que n’apparaissent pas des difficultés par rapport à la nouvelle baseline. La France continuera à être active au côté de la Commission européenne pour s’assurer du soutien politique constant de l’ensemble des partenaires d’ITER.

La France, qui contribue de manière directe et indirecte à hauteur d’un tiers de la contribution européenne, suit avec une attention particulière le déroulement du projet et les autorités françaises seront vigilantes à prévenir toute nouvelle dérive calendaire et/ou budgétaire du projet.
L’agence européenne, Fusion for Energy (F4E) a notablement amélioré son fonctionnement sous l’impulsion de son Directeur M. Schwemmer, dont je salue l’action. Compte tenu de son rôle clé, il est indispensable qu’elle remplisse ses engagements calendaires et financiers (notamment pour les bâtiments et l’enceinte à vide). Elle se doit d’être exemplaire dans le déroulement des projets qui lui sont confiés et la France est très active pour l’accompagner en ce sens.

Je terminerai en soulignant l’intense activité industrielle liée à ITER. Vous avez donnez quelques chiffres impressionnants Monsieur le Commissaire, je n’en ajouterai qu’un : 500 entreprises sont actuellement impliquées sur le chantier de construction qui impliquent directement ou indirectement tous les pays impliqués dans ITER : 10 % sont des contractants directs de F4E, 70 % des sous-traitants de rang 1 et 20 % des sous-traitants de rang 2.
ITER favorise ainsi clairement les partenariats industriels européens et internationaux et permet à l’U.E de construire l’industrie de la fusion. La France se réjouit de jouer un rôle significatif dans la construction d’ITER grâce aux contrats remportés par ses entreprises, le plus souvent au sein de consortiums européens ou internationaux.

Pour n’en prendre que 4 exemples :

  • Consortium Momentum entre Assystem, Amec Foster Wheeler (UK) et KEPCO (Corée), titulaire du contrat IO de maîtrise d’œuvre d’exécution de l’assemblage d’ITER
  • Consortium CNIM et SIMIC (Italie), constitué pour la fabrication des plaques radiales des bobines toroïdales
  • Consortium VFR constitué entre Vinci, Ferrovial (Espagne) et Razel Bec, pour le génie civil des bâtiments du complexe Tokamak
  • Consortium OMEGA constituée entre Engie et MW Group (Allemagne et UK) pour le contrat des équipements mécaniques, électriques et la ventilation nucléaire de ces bâtiments.

Une phase cruciale s’ouvre maintenant pour ITER, celle de l’assemblage et de l’intégration des différents systèmes et composants de la machine.

Il est essentiel que l’Europe fasse bénéficier le programme ITER de son excellence industrielle et de son expertise nucléaire dans cette phase décisive pour le succès du projet. J’encourage à cet égard les entreprises, en particulier françaises, à développer de nouveaux partenariats à l’échelle européenne.

Cette phase d’intégration permettra également aux entreprises de consolider leurs savoir-faire sur d’autres marchés de même niveau d’exigences, au plan national, européen ou international, qu’il s’agisse de marchés de la grande industrie, notamment de l’énergie nucléaire, qui offre de multiples opportunités, ou du marché des grandes infrastructures de recherche.

En conclusion, je tiens à souligner combien ITER me paraît une aventure humaine, scientifique, technologique et industrielle unique  demandant une parfaite coopération sur tous ces plans. Vous pourrez compter sur le soutien de la France. 

Je vous remercie et vous souhaite une  fructueuse journée d’échange.

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