bo Bulletin officiel Ministère de l'Enseignement supérieur
et de la Recherche

Édité par le MESR, le Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche publie des actes administratifs : décrets, arrêtés, notes de service, circulaires, avis de vacance de postes, etc. La mise en place de mesures ministérielles et les opérations annuelles de gestion font l'objet de textes réglementaires publiés dans des BO spéciaux.
Publication hebdomadaire (ISSN : 2110-6061)

Déconcentration en matière d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation

Renforcer la déconcentration en matière d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation

nor : MENG2523527C

Circulaire du 11-8-2025

MENESR – SG


Texte adressé au directeur général de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle ; au directeur général de la recherche et de l’innovation ; aux recteurs et rectrices de région académique ; aux recteurs délégués et rectrices déléguées pour l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation ; au secrétaire général ; aux recteurs et rectrices d'académieRéf. : Code de l’éducation, notamment articles L. 222-2, L. 711-8, L. 719-7 et L. 719-8 ; R. 222-1, R.

La politique d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation (Esri) se déploie par nature à plusieurs échelles : compétition internationale pour la connaissance, pour les étudiants, pour les enseignants-chercheurs, pour la recherche, pour les talents, pour l’innovation ; espace européen de l’enseignement supérieur et de la recherche ; orientations nationales en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) de la Nation, de priorités thématiques de recherche et de transfert ; et enfin, ancrage territorial d’un grand nombre d’établissements, qui sont notamment tournés vers les besoins en compétences et en formation.

Depuis une quinzaine d’années, le renforcement de l’autonomie des établissements et le développement des politiques de site, ainsi que le rôle de chef de file confié aux universités sur les territoires, ont conduit à une différenciation accrue qu’illustre en particulier la création récente des établissements publics expérimentaux. Cette autonomie permet à chaque établissement, en fonction de sa signature, de déployer pleinement une stratégie propre sur les différentes échelles rappelées plus haut. 

Alors que la politique d’Esri est principalement mise en œuvre par des opérateurs de l’État (universités, écoles, organismes de recherche, autres établissements publics), le fonctionnement des administrations centrales et déconcentrées doit mieux s’adapter à l’autonomie et à la différenciation renforcée de ces acteurs. La situation actuelle conduit trop souvent à un traitement uniforme des établissements, indépendamment de leurs échelles prioritaires d’intervention, ce qui génère une dissociation, dans la tutelle de l’établissement, entre la compréhension de sa stratégie et la vérification de la soutenabilité de son modèle économique, ainsi qu’une inadaptation profonde aux spécificités de chacun.

En particulier, tandis que les universités ont, dans le cadre de leurs politiques de site, fortement renforcé leurs liens avec leurs partenaires locaux, qu’il s’agisse des collectivités territoriales – contributrices à hauteur d’un milliard d’euros par an en moyenne – ou d’acteurs économiques, la centralisation à Paris de la fonction de tutelle des établissements ne permet pas de saisir la richesse de ces relations qui constituent bien souvent des aspects majeurs de la stratégie et du modèle économique des universités aujourd’hui. En outre, la mise en œuvre d’une démarche de GPEC de la Nation nécessite une connaissance fine du tissu économique et du bassin d’emplois afin de permettre à chaque établissement de répondre de la façon la plus pertinente aux besoins du territoire.

Dans ce contexte, l’organisation administrative du ministère doit reposer sur une articulation renforcée entre la stratégie nationale définie par le ministère et la mise en œuvre territorialisée, pilotée par les recteurs de région académique et les recteurs délégués pour l’Esri, au plus près des besoins des établissements et des acteurs locaux. 

Ces prérogatives ministérielles que vous exercez dans le champ de l’Esri doivent donc aujourd’hui faire l’objet d’une déconcentration renforcée. Aussi, je vous invite, dans vos différentes responsabilités, à assurer désormais un rôle accru et notamment à conduire un dialogue stratégique exigeant avec les établissements d’enseignement supérieur de votre région académique, en fédérant le plus grand nombre d’acteurs locaux, notamment les collectivités territoriales. Cette déconcentration, loin de marquer un désengagement stratégique ou budgétaire de l’État, correspond à une volonté assumée de faire confiance aux acteurs de terrain en donnant aux établissements la possibilité de porter une stratégie claire et forte auprès de l’ensemble de leurs partenaires. Au sein de l’État, elle doit aussi permettre de ne recourir à l’échelon central de l’administration que quand cela est utile et non plus systématiquement.

I – Votre rôle est désormais bien ancré pour exercer des missions essentielles au bon fonctionnement de l’enseignement supérieur et de la recherche 

S’agissant des recteurs, vous assurez tout d’abord le contrôle budgétaire et de légalité de la majorité des établissements d’enseignement supérieur. Cette fonction doit s’exercer en tenant compte de l’autonomie des établissements et de la liberté de gestion dont ils disposent. 

Au-delà de ces fonctions régaliennes, vous êtes en charge de missions également essentielles que sont la coordination de la carte des formations de l’enseignement professionnel avec les régions, l’organisation des examens et concours et des jurys rectoraux, le paiement des bourses sur critères sociaux. Vous participez également à la définition des contrats de plan État-Région (CPER) sous l’égide des préfets et assurez le suivi des opérations immobilières des établissements.

Votre capacité d'action et d'expertise dans ces domaines est reconnue. Elle s’est enrichie, depuis la réforme territoriale mise en œuvre le 1er janvier 2020. La création, auprès du recteur de région académique, d’un emploi de recteur délégué pour l'Esri dans sept régions pluri-académiques et l’affirmation du rôle du délégué régional académique à la recherche et l’innovation (Drari) se sont inscrites dans ce contexte. 

Cette organisation territoriale vous permet de contribuer au pilotage de l'ensemble des enjeux portés par les établissements de l'enseignement supérieur, les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) et les structures en charge des politiques territoriales d'innovation. 

Au-delà et plus largement, vous êtes les garants du continuum entre l’enseignement scolaire et l’enseignement supérieur. À ce titre, vous favorisez le dialogue de proximité entre les acteurs de l’enseignement scolaire, de l’enseignement supérieur et de la recherche et de l’ensemble des partenaires locaux.

II – La nouvelle étape de déconcentration engagée doit se traduire par une autonomie accrue pour les universités et un rôle renforcé des recteurs dans le champ de l’enseignement supérieur et de la recherche

L’autonomie croissante des établissements, tout comme l’implication grandissante des acteurs locaux dans le champ de l’enseignement supérieur et de la recherche nécessite une déconcentration accrue. Il s’agit tout autant d’une mesure de renforcement de l’efficacité de notre action que d’un acte de confiance envers les établissements. 

La démarche de déconcentration vise tout d’abord à alléger les processus décisionnels, à renforcer l’agilité des services de l’État et à améliorer l’efficacité de l’action publique au plus près des territoires.

Dans ce contexte, pour ce qui concerne les recteurs, vous avez vocation à incarner localement la stratégie nationale ministérielle, dans une logique de subsidiarité, en pilotage comme en gestion. 

Sur de nombreuses politiques publiques comme l’orientation, dans une logique de continuum (« - 3/+ 3 »), les procédures d’affectation via Parcoursup et Mon Master, la mise en œuvre des plans Avenir(s), les feuilles de route de la vie étudiante, la fixation des capacités d’accueil, la prévention et traitement des violences sexistes et sexuelles (VSS), l’accueil des étudiants internationaux, la veille et alerte en matière de défense et de sécurité, vous exercez déjà une coordination ou un pilotage régional. Ces actions doivent désormais être renforcées, et ce dans le cadre des trajectoires stratégiques sur cinq ans des établissements, notamment en termes d’offre de formation et d’évolution des capacités d’accueil.

En matière de recherche et d’innovation, avec l’appui des Drari, votre rôle est essentiel dans les dispositifs de soutien à l’innovation (le pôle universitaire d’innovation [PUI], la société d’accélération du transfert de technologies [Satt], le crédit d’impôt recherche [CIR], la convention industrielle de formation par la recherche [Cifre]) et, de manière croissante, dans la mobilisation des fonds européens. Vous veillerez à prendre en compte la dimension interministérielle de ces sujets, notamment pour ce qui relève de France 2030.

La dynamique amorcée par la déconcentration de la contractualisation en 2023 via les contrats d'objectifs, de moyens et de performance (Comp) vous a donné un rôle inédit dans l’accompagnement des établissements. Cette dynamique prend aujourd’hui une nouvelle ampleur, avec le lancement des nouveaux Comp pour les 10 universités des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Nouvelle-Aquitaine, qui seront généralisés à l’ensemble du territoire à compter de 2026. Ceux-ci, fusionnés avec les contrats pluriannuels, visent à renforcer l’autonomie des établissements et se fonderont sur une feuille de route partagée élaborée à partir de la stratégie définie par l’établissement. Les Comp rénovés ont vocation à inclure l’ensemble des acteurs concernés, et notamment les collectivités territoriales et les acteurs socio-économiques. Ils incluront également les priorités stratégiques de recherche, en lien avec les organismes nationaux de recherche concernés. Cette dynamique place les recteurs au premier plan dans la préparation, la négociation, le pilotage et le suivi de ces contrats, qui porteront désormais sur l’intégralité des missions des établissements et sur l’ensemble de leur modèle économique. Dans le cadre de la négociation contractuelle, les recteurs disposeront de plusieurs leviers de négociation avec les établissements : crédits immobiliers, capacités d’accueil ou encore carte des formations. Concernant plus particulièrement l’allocation des moyens en subvention pour charges de service public (SCSP), celle-ci sera définie après avis de la direction générale de l'enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (Dgesip), sur le fondement de l’enveloppe nationale définie dans le budget de l’État.

Par ailleurs, pour les régions qui ne sont pas concernées par les nouveaux Comp cette année, il vous revient, dans le cadre du contrôle financier et du dialogue stratégique avec les établissements, de veiller tout particulièrement à les accompagner dans la mobilisation de leur trésorerie afin de réduire l’argent dormant et de financer, dans le respect de leur soutenabilité budgétaire, des opérations qui le nécessitent. La contribution à la bonne gestion des deniers publics est de notre responsabilité à tous.

Cette action au plus près du terrain a par ailleurs vocation à s’approfondir dans le champ de la régulation de l’enseignement supérieur privé.

Je souhaite que nous puissions aller plus loin encore dans les prochains mois. De nombreux actes de gestion relèvent encore de l’administration centrale – nomination, ressources humaines – sans que cela ne se justifie nécessairement. J’ai demandé que soient examinés la possibilité et l’intérêt d’en déconcentrer la gestion vers les rectorats ou les établissements en poursuivant deux objectifs : subsidiarité et autonomie des universités.

III – L’affirmation accrue du rôle des recteurs de région académique se traduira notamment par une feuille de route pour l’enseignement supérieur et la recherche

Afin de répondre à ces nouveaux enjeux, je vous demande de mobiliser l’ensemble des compétences de vos services, d’interroger les possibles coopérations interservices au sein de vos rectorats (services de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR), ressource humaine (RH), immobilier, examens et concours, financiers et comptables, sécurité, etc.), en lien étroit avec les établissements d’enseignement supérieur et les partenaires territoriaux.

Dans ce contexte renouvelé, je souhaite que vous m’adressiez, d’ici au 1er octobre 2025, une feuille de route régionale, qui exposera votre stratégie d’appropriation des nouvelles compétences ESR, votre organisation actuelle et les évolutions envisagées pour atteindre les objectifs fixés. J’attends notamment que vous y précisiez vos priorités d’accompagnement des établissements. 

Parallèlement, je demande aux directions générales du ministère, et notamment à la direction générale de l'enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (Dgesip) et à la direction générale de la recherche et de l’innovation (DGRI), de permettre et accompagner ce mouvement de déconcentration et d’autonomie en mettant en œuvre, à chaque fois que l’action de l’État est sollicitée, le principe de subsidiarité. Il est donc impératif que les situations locales soient, lorsque cela se justifie, gérées directement à l’échelle locale, sous la responsabilité des rectorats ou des établissements en fonction des compétences de chacun.

Pour faciliter ce mouvement, la Dgesip et la DGRI sont chargées de s’organiser afin de proposer aux recteurs une interface unique, réactive et opérationnelle, facilitant le dialogue et le suivi des politiques nationales. Cette interface unique prendra racine au sein du service de la coordination des stratégies de l’ESR, commun aux deux directions générales. Tous les outils de pilotage et d’analyse par la donnée seront mis à disposition des rectorats de région : Quadrant, le tableau de bord des universités (TBU), et à terme Fresq dans sa version FresqViz une fois tous les développements terminés. 

Je sais pouvoir compter sur votre engagement pour faire de cette démarche un levier de transformation au service de la performance publique, de la réussite des étudiants et de l’excellence scientifique de notre pays et de ses territoires.

 

Fait à Paris le 11 août 2025,

 

Le ministre auprès de la ministre d’État, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche,
Philippe Baptiste

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