Normalien, directeur de recherche à Inria, professeur à l’École Polytechnique puis à l’École normale supérieure de Paris-Saclay, Gilles Dowek a été une figure intellectuelle essentielle du monde scientifique français. Il a su articuler, dans toute son œuvre, exigence mathématique, clarté conceptuelle et responsabilité civique — traçant des ponts féconds entre logique, informatique, philosophie et pédagogie.
Ses recherches ont porté sur les systèmes de déduction, les langages formels, la certification des programmes, et plus largement sur les conditions dans lesquelles un raisonnement peut être considéré comme valide — qu’il soit humain ou assisté par machine. Il s’est notamment intéressé à la preuve assistée par ordinateur du théorème des quatre couleurs, un cas emblématique qui l’a conduit à interroger, avec une grande acuité, ce que signifie "démontrer" à l’ère numérique.
Dans des ouvrages comme Les métamorphoses du calcul ou Une machine intelligente ?, il a su rendre accessibles à un large public des questions techniques et conceptuelles complexes, sans rien céder à la rigueur. À travers son travail de vulgarisation, ses interventions dans le débat public, et ses réflexions sur l’enseignement de l’informatique, il a contribué de manière décisive à faire reconnaître cette discipline comme un pilier fondamental de la culture générale contemporaine.
Gilles Dowek croyait profondément aux vertus émancipatrices du savoir scientifique, à condition qu’il reste interrogé, discuté, partagé. Il laisse une œuvre importante, mais aussi un modèle d’engagement intellectuel, dont l’université et la société tout entière continueront de s’inspirer.
Gilles Dowek incarnait une forme rare d’intelligence ouverte : à la rigueur des démonstrations, il associait la clarté du langage, la hauteur de vue et une attention sans compromis à la formation des esprits. Son œuvre nous accompagne, et nous oblige.