[Série] Immersion au cœur de la police scientifique
Au quotidien, la science joue un rôle incontournable dans de nombreuses enquêtes de police. Découvrez notre série de reportages en co-production avec la police nationale.
L'acte de recherche comme trait d'union
Indéniablement, les sciences ont créé une passerelle entre le monde judiciaire et l'univers de la recherche. D'un point de vue linguistique, il est d'ailleurs intéressant de noter les différentes significations du mot « recherche ».
Parmi les définitions possibles du terme, Le Robert en propose deux en particulier, qui, mises en complémentarité, contribuent à esquisser l'essence même de la police scientifique.
Effort pour trouver (qqch.). La recherche d'une information.
Action de rechercher (qqn). Avis de recherche.
Effort de l'esprit vers (la connaissance). La recherche de la vérité.
Travaux faits pour trouver des connaissances nouvelles. Recherches scientifiques.
Et de fait, la mission et la méthode de la police scientifique sont bel et bien de « trouver quelque chose, ou quelqu'un, en recherchant la vérité, à l'aide de connaissances scientifiques ».
Une série policière ancrée dans la réalité
Articulée autour de quatre épisodes, la série de reportages proposée ci-dessous est le fruit d'une étroite collaboration entre le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche et les services de la police nationale, en particulier le service national de police scientifique (SNPS).
Prenant comme point de départ une situation fictionnelle - une scène de crime reconstituée - cette série de reportages immersifs a néanmoins été conçue avec l'exigence de crédibilité comme boussole éditoriale.
Grâce à l'expertise des professionnels impliqués tout au long du projet, chaque épisode permet de comprendre le cheminement des preuves recueillies, de la scène de crime jusqu'aux laboratoires de police scientifique, à Écully en région lyonnaise et à Saint-Denis en région parisienne.
Découvrez quelques-uns des métiers et des méthodes mobilisés au sein de différentes disciplines faisant toutes appel à la rigueur exigée par la méthode scientifique d'une part, la recherche de la vérité d'autre part.
Les prélèvements
Dans cette première séquence, les équipes de « la scientifique » se rendent sur la scène de crime. Le scénario qui semble se dessiner est celui d'un viol. Débute alors immédiatement le travail de prélèvement.
Certains objets trouvés sur la scène de crime peuvent potentiellement constituer une preuve matérielle, participant à établir le déroulement des faits. Ces objets sont récupérés avec le plus grand soin afin de constituer les fameux scellés. Quelle est la méthodologie employée pour cette première étape de l'enquête ?
Transcription textuelle | Police scientifique - Scène de crime
On ne va pas aller plus loin, on va passer derrière l'arbre et puis derrière l'objet, qu'on ne voit pas trop, et puis derrière le petit coin d'assise. On va se délimiter ça ?
On a la culotte de la victime. Elle a dû peut-être se faire violer par ici.
Ici on a une canette. Si ça se trouve il attendait sur la table. Il s'est assi et est peut-être resté un petit moment en attendant sa victime.
Là c'est le couteau dont les collègues m'ont parlé. Ils m'ont dit qu'elle avait été contrainte par la menace donc je pense qu'il l'a menacée avec ça.
On va pouvoir faire des prélèvements d'odeur sur l'assise et sur le couteau. Je vais d'abord mettre la lingette sur le papier d'alu et pour ne pas polluer le couteau, si on fait des recherches ADN, je vais changer de gants. Là je n'ai rien touché avec ma main droite, je peux prendre le couteau par un endroit illogique. Je vais pouvoir fermer la papillote. Maintenant que les papillotes sont faites, pour que les molécules d'odeurs imprègnent bien le tissu, on va laisser poser pendant une heure.
On va attaquer la phase deux : la recherche et la matérialisation des indices. On est sur une demande d'intervention. On a trouvé les prélèvements, donc on a un objet, la culotte. Dessus on va pouvoir faire des recherches de traces biologiques. On a aussi un objet, le couteau. Ce sera notre deuxième scellé. On va pouvoir faire la recherche de traces papillaires et traces biologiques. On a aussi une canette. Notre troisième scellés. OK, on trois prélèvements. On va pouvoir passer à la phase trois, trouver les photos et on va prendre les cotes pour les objets.
Le principe des vues rapprochées, c'est de rattacher l'indice dans son élément, dans son contexte. On a donc le couteau qui est par ici et on a la canette. Maintenant on va pouvoir prendre les mesures pour figer tout ça. 2m75, tout pile ; zéro zéro ; 4m97. Ca fait une heure que ça posé, donc on va pouvoir récupérer les prélèvements d'odeurs. Un bocal, va faire une petite étiquette. On est sur un couteau au sol. Je touche avec mon gant propre pour pas polluer l'ADN. Mon bocal, pour ne pas que les molécules s'en aillent. Je vais mettre un petit peu de pâte à modeler
pour surélever ma tête millimétrée, pour avoir une photo bien nette. Je fais les mains propres et tu fais les mains sales comme ça on change moins de gants. Je vais le tenir. On la rendre délicatement pour ne pas frotter et altérer les traces papillaires qu'on pourrait avoir dessus. On essaie de la bloquer dans l'enveloppe pour ne pas qu'elle bouge de trop pendant le voyage.
Les talents olfactifs du chien ne sont plus à démontrer. Sa capacité à mémoriser des dizaines de milliers d'odeurs différentes et la finesse de son odorat sont mis à contribution par la police scientifique. Ce talent, s'il est inné, s'exprime dans le cadre d'un entraînement rigoureux et d'une procédure d'identification d'odeur balisée qui réduit à son maximum la marge d'erreur.
Au centre de cet épisode, l'odeur présente sur le couteau trouvé sur la scène de crime.
Je vais briser les scellés pour préparer ma ligne de travail. Le tissu que je vais extraire du scellé correspondant au couteau, je vais l'appeler "U". Le tissu que je vais extraire du scellé du prélèvement du mis en cause je vais l'appeler "U1". Celui qui reste je le remets dans le sachet à scellés. Même opération pour le prélèvement du mis en cause. J'ai extrait un tissu et je le mets dans "U1".
Je vais induire une nouvelle odeur de tapissage et je vais retirer l'odeur à trouver du mis en cause pour que ce soit une ligne vide. Maintenant je vais réintroduire l'odeur à trouver qui est "U1", la remettre dans la ligne, pour que le chien puisse retrouver l'odeur.
Reconnaître rapidement, nous, on n'intervient pas là-dessus parce qu'ils ont des facultés olfactives énormes. Nous, ce qu'on leur apprend, c'est la mécanique. Apprendre à mettre son nez dans l'indice odorant, dans le bocal de l'indice odorant du départ, et ensuite aller sur la ligne de travail et mettre son nez dans chaque bocal qu'il va rencontrer sur sa ligne de travail. Ça, c'est une phase qui est hyper importante et c'est la première phase qu'on leur apprend. La mécanique, mécanique, mécanique. On répète beaucoup. On va introduire les odeurs doucement et avec le marquage, et ainsi de suite. Le chien très vite fait l'assimilation entre ce qu'on lui demande au début et ce qu'il trouve dans la ligne.
Dans notre protocole il est établi qu'on doit faire travailler deux chiens. Si le deuxième chien vient valider le travail de l'un, on va rendre un rapport d'identification positive. Entre un chien qui part de rien et un chien validé, en moyenne 12-16 mois en fonction des chiens.
A six mois on commence et après généralement entre un an et demi et deux ans, ils sont validés et ils peuvent travailler sur des dossiers judiciaires.
La grosse différence, c'est qu'un chien de recherche de stupéfiants, dans sa mémoire, il connaît tous les produits qu'il doit rechercher. On leur fait mémoriser à l'avance et ils savent quand ils partent travailler ils savent ce qu'ils doivent chercher et ce qu'ils doivent trouver.
Nous, concrètement, ils ont rien en mémoire parce que chaque être humain a une odeur qui lui est propre. Chaque exercice qu'on présente au chien, à chaque fois, c'est une découverte, comme l'indice odorant, il ne connaît pas la ligne de tapissage, il ne connaît pas
les odeurs de la ligne de tapissage.
Le saviez-vous ? En 2016, des chercheurs du CNRS ont publié les résultats d'une étude menée de 2003 à 2016 avec les chiens des services de police scientifique basés à Écully. Les conclusions de cette étude ont établi qu'à l'issue d'un entraînement régulier de deux ans, les chiens parvenaient à reconnaître deux odeurs provenant de la même personne dans 85 % des cas. Majoritairement, dans les 15 % des cas où il y avait une absence d'association d'odeur, c'est la qualité du prélèvement ou de l'odeur elle-même qui était en cause, et non les capacités du chien.
L'ADN, une révolution scientifique et judiciaire. Dans cet épisode, découvrez comment se déroule concrètement le processus d'identification d'un individu à partir de son profil génétique. Par quels gestes et procédés les techniciens de la police scientifique parviennent-ils à relier un ADN prélevé sur un objet, trouvé sur une scène de crime, à un individu ?
Cet épisode permet de retrouver l'un des scellés vu dans le premier épisode, en l'occurrence une culotte.
Une fois le scellé observé et décrit, on va procéder à la découpe de la culotte afin de la mettre à plat pour pouvoir avoir accès à la zone d'intérêt qui est l'entrejambe au moment de la presse.
J'ai humidifié le papier Sperm Tracker. L'idée, c'est que les cellules qui sont présentes sur la culotte et donc potentiellement la phosphatase acide puissent réagir avec les produits présents dans le Sperm Tracker.
On vient regarder directement sur le papier, car la réaction, elle se fait sur le papier. La présence ou l'absence de phosphatase acide. Et là, on peut constater qu'au niveau dans un premier temps de notre témoin positif, la réaction a bien fonctionné. Donc la presse est validée et maintenant on peut regarder le résultat sur notre scellé et on voit qu'on a bien une trace positive sur la culotte au niveau de l'entrejambe.
On va regarder également de l'autre côté la réaction et on voit que ça a bien transpercé. C’est un tissu assez fin, donc c'est logique. Donc là, l'idée c'est de délimiter la trace, parce qu'une fois la lumière allumée, on ne pourra plus la reconnaître. Donc je vais pouvoir délimiter directement sur mon scellé à l'aide d'un marqueur, la trace que l'on a détectée.
Nous avons détecté la phosphatase acide qui est l'un des composants du sperme et qui ne confirme pas pour l'instant que nous avons des spermatozoïdes. On vient de détecter une trace, on fait toujours une feuille de suivi pour montrer où était notre trace, on y met toutes les informations relatives à la saisine. On va faire un dessin de notre culotte qui nous permettra de pouvoir le consulter plus tard et savoir exactement où étaient les traces que l'on a détectées.
On va donner des indications quant à la trace que l'on a vue parce qu'on ne pourra pas la revoir à nouveau. Le papier, on ne l'a plus. Et là, pour le coup, la fluorescence était bonne et afin de pouvoir récupérer les cellules sur le sol et donc sur la trace, on va l’humidifier avec du sérum physiologique.
Là, on vient frotter dans toute la trace pour essayer de récupérer un maximum de cellules et de potentiels spermatozoïdes afin de s'assurer qu'on ait récupéré un maximum de matériel. Ce qu'on va faire également, ce on va venir découper dans la culotte des petits morceaux de tissu. L'idée, c'est que si les petits spermatozoïdes se sont incrustés dans le tissu et qu'on n'a pas réussi à les récupérer avec l’écouvillon, on double nos chances en découpant des morceaux de tissus.
Donc là, nous avons le coton et le tissu sur lequel nous avons potentiellement des spermatozoïdes. Et afin de pouvoir les détecter, on va les mettre en macération. Donc on va ajouter quelques gouttes de sérum physiologique dans notre tube afin de permettre la macération. Le lendemain, j'ai récupéré mon liquide de macération que je viens déposer sur une lame de microscopie.
On va déposer le colorant sur la lame qui va permettre de colorer le noyau des cellules ainsi que les spermatozoïdes en rouge.
Je suis à la recherche de potentiels spermatozoïdes sur ma lame. Donc je balaie lentement la lame de haut en bas afin de m'assurer que j'ai bien tout vérifié. Et dès lors où j'ai trouvé un spermatozoïde, je peux m'arrêter. On vient de trouver des spermatozoïdes, on peut les voir à l'écran juste là. On a une coloration rouge avec des côtés qui est blanc et on voit même le flagelle du spermatozoïde qui est juste derrière.
On en a trois déjà rien que sur l'écran. On va procéder à la lyse différentielle. L'idée c'est de venir extraire dans un premier temps l'ADN des cellules qui sont celles de la victime et dans un second temps, on viendra extraire l'ADN des spermatozoïdes qui sont ceux du mis en cause. Maintenant que l'ADN est extrait, on va venir l'amplifier et le séquencer afin d'obtenir les profils génétiques.
Pour l'amplification, on vient faire ce qu'on appelle une PCR. C'est une photocopie de l'ADN pour nous permettre d'en avoir en quantité suffisante afin de pouvoir le séquencer.
Les résultats de la lyse différentielle sont sortis. Pour les culots, on voit qu'on a un bon profil pur. On a un pic X et un pic qui correspond au chromosome Y. On a bien un profil masculin, On va transformer ça en fiche expert. Voilà les informations, notamment ici le chromosome X et le chromosome Y pour notre profil masculin. Et ça va pouvoir être transmis au fichier national automatisé des empreintes génétiques pour comparaison.
Les traces papillaires désignent l'ensemble des empreintes, digitales ou palmaires, que la police scientifique peut relever. Dans cet épisode, découvrez comment ces empreintes sont d'abord « révélées » sur une canette, puis analysées - en identifiant les marqueurs uniques de l'empreinte. Enfin, l'empreinte est comparée avec celles référencées au Fichier automatisé des empreintes digitales (FAED).
Ce n'est pas une surface poreuse. Il n'y a pas d'adhésif. J'observe que c'est une surface lisse. Par conséquent, j'utilise la cuve Lumicyano pour ce scellé. Je vais utiliser la balance pour peser mes deux réactifs. Je vais ajouter dans un premier temps ma poudre luminescente et j'ajoute la masse de colle cyanoacrylate dans la coupelle. Donc là, je vais prendre ma coupelle et je vais l'insérer dans la cuve Lumicyano.
Les deux réactifs sont prêts. Donc là, je vais faire mon témoin pour valider ma technique analytique. Là, on peut voir mon empreinte digitale sur la lame composée de gras. Et à l'intérieur, il y a des acides aminés. Je vais la mettre dans la cuve Lumicyano pour voir que la technique fonctionne au niveau des réactifs. J'ai mon scellé, j’ai mon témoin, j'ai mes réactifs. Je lance ma technique pour 30 minutes.
Les vapeurs de colle vont se déposer sur les acides aminés pour colorer les crêtes qui composent ma trace papillaire. Je peux observer différentes traces papillaires sur ce scellé. Sur mon témoin positif, j'observe l'empreinte digitale que j'avais déposée. Par conséquent, le gras a été coloré en blanc grâce aux vapeurs de colle dans cette enceinte Lumicyano. J'observe les traces sur le scellé.
J'en observe une, une deuxième, une troisième. Là, avec cet éclairage en lumière bleu vert, filtre orange, ça va permettre de faire ressortir les crêtes sur les couleurs. Ici, la couleur un peu dorée, les couleurs un peu plus claires. Elle est magnifique. Ça, c'est la pige pour l'envoyer au FAED. Une pige obligatoire pour avoir la taille de la trace.
Première minutie. Je continue. J'observe ici deux crêtes, une, deux qui bifurquent en une seule minutie. Deuxième point, je suis à six points caractéristiques. Six minuties, je continue. Ici, j'observe une autre bifurcation, deux crêtes en une. Je caractérise. Ici, j'ai un arrêt de ligne. Je caractérise. J'ai treize points caractéristiques. Il faut au minimum douze points caractéristiques pour l'envoyer au FAED, le Fichier automatisé des empreintes digitales. La trace est de classe A, elle est exploitable. Je peux donc l'envoyer au FAED.
Donc ici, on a la trace qui nous a été envoyée par le laboratoire qui a procédé à la révélation. Je vais procéder à la mise en place des points caractéristiques pour pouvoir procéder à sa recherche dans le FAED. Les points caractéristiques sont des altérations des crêtes sur la trace.
Les crêtes sont les reliefs que l'on trouve sur les doigts et les paumes des mains et des plantes des pieds. C'est l'endroit où se situent les pores par lesquels la transpiration peut s'échapper. On va donc envoyer ce nuage de points dans le système pour comparer à tous les nuages de points présents dans la base. Donc le système nous a remonté plusieurs candidats classés par ordre croissant par rapport au score de correspondance de chacun des nuage de points.
On a de ce côté la trace et de ce côté l'empreinte de comparaison. Si j'ai douze points, je pourrais affirmer que cette trace correspond à ce doigt. Donc ici, j'ai un point, je compte une crête et je vois qu'au-dessus, cette crête s'arrête. Je vais regarder sur l'empreinte si j'ai ce même point caractéristique au même endroit. Si j'ai douze points, je pourrai affirmer que cette trace correspond à ce doigt.
Ici, j'ai mes douze points. Je déclare le hit et donc cette trace sera identifiée au doigt de cet individu.