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Bulletin officiel
Ministère de l'Enseignement supérieur
et de la Recherche
Édité par le MESR, le Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche publie des actes administratifs : décrets, arrêtés, notes de service, circulaires, avis de vacance de postes, etc. La mise en place de mesures ministérielles et les opérations annuelles de gestion font l'objet de textes réglementaires publiés dans des BO spéciaux.
Publication hebdomadaire (ISSN : 2110-6061)
Cneser
Sanctions disciplinaires
nor : MENH2520835S
Décisions du 7-7-2025
MENESR – CNESER
Monsieur XXX
N° 1734
Madame Nolwenn Peton
Rapporteure
Séance publique du 22 mai 2025
Décision du 7 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
Le président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne a engagé le 15 octobre 2021, contre Monsieur XXX, maître de conférences en droit public, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de son établissement ;
Par une décision du 19 juillet 2022, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne a infligé à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions de recherche, ainsi que d’encadrement de travaux de master et de doctorat, et de tutorat de stage, dans tout établissement public d’enseignement supérieur pour une durée de cinq ans, avec privation de la moitié du traitement et a décidé que sa décision serait immédiatement exécutoire nonobstant appel ;
Par un appel formé le 18 septembre 2022, puis par deux mémoires complémentaires réceptionnés au greffe du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) statuant en matière disciplinaire le 11 mars et 19 mai 2025,ainsi que par la production, le 19 mai 2025, de trois attestations, Monsieur XXX, représenté par Maître Jacques Ferstenbert, demande au Cneser statuant en matière disciplinaire l’annulation de la décision rendue le 19 juillet 2022 par la section disciplinaire de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et que soit prononcée sa relaxe ;
Il soutient que :
S’agissant de la régularité de la décision de la section disciplinaire :
- la décision est entachée d’un défaut d’impartialité dès lors que les membres de la formation de jugement ont eu des propos témoignant de leur partialité, ont tenté de déstabiliser les témoins déposant en faveur de Monsieur XXX, ont nié les propos de certains de ces témoins, ont reconstruit les faits reprochés à Monsieur XXX et dénaturé les faits, ont statué sur des faits dont ils n’étaient pas saisis, ont créé de la norme ex nihilo et ont méconnu le principe du contradictoire ;
- la décision méconnait les droits de la défense dès lors que les personnes ayant témoigné à charge contre Monsieur XXX n’étaient pas présentes lors de l’audience, qu’un témoin à charge a été entendu sans que Monsieur XXX n’en soit informé, qu’un membre de la formation de jugement a tenté d’écourter les débats, qu’un dossier incomplet a été communiqué à la commission d’instruction et que le président de la formation de jugement aurait ordonné de ne pas communiquer à Monsieur XXX les dernières pièces versées au dossier, que le traitement de la répartition de la parole entre la défense et l’accusation a été déséquilibré, que le président de la formation de jugement aurait déclaré ne pas informer les parties du fait de savoir s’il avait l’intention de prendre ou non en compte le témoignage de Madame YYY, que la section disciplinaire a refusé de communiquer les enregistrements de la séance de jugement et que le procès-verbal de cette séance est un faux ;
S’agissant de la régularité de la procédure administrative :
- la pré-enquête a été confiée à tort au vice-président en charge des finances et des affaires juridiques alors que ce dernier est en conflit ouvert avec Monsieur XXX et a ainsi mené une instruction au caractère artificiel ;
- les auditions menées par Monsieur ZZZ sont dénuées de toute impartialité ;
- le dossier remis à la commission disciplinaire était incomplet ;
- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors qu’il n’a pas été informé de la pré-instruction ;
- le secret de l’instruction a été méconnu ;
S’agissant du bien-fondé de la décision :
- c’est à tort que la formation de jugement a considéré que le dossier remis à la commission d’instruction était complet, certaines pièces étant manquantes et d’autres volontairement dissimulées ;
- la pré-instruction menée à charge était irrégulière ;
- le directeur de l’école doctorale a exercé des pressions sur une étudiante afin qu’elle produise un nouveau témoignage ;
- le conflit autour du projet Eyvol a eu une influence sur la procédure disciplinaire ;
- Monsieur ZZZ a exercé des pressions sur Monsieur AAA ;
- la formation de jugement a dénaturé et réinterprété la réalité ;
- les faits concernant la prétendue interposition d’un intermédiaire dans la relation entre Monsieur XXX et ses doctorants en situation de sujétion psychologique ne sont pas démontrés, aucun élément du dossier ne permettant de démontrer leur matérialité ;
- Madame BBB a menti ;
- Madame CCC a énoncé des contre-vérités ;
- Monsieur AAA a menti ;
- les corrections demandées au prestataire, Monsieur DDD, ne portaient que sur la forme et non sur le fond ;
- la charte du doctorat ne lui est pas opposable ;
- concernant l’accueil par Monsieur XXX d’étudiantes dans son cabinet d’avocat, des pressions ont été exercées sur une étudiante lors de la pré-instruction afin d’obtenir des aveux mensongers ;
- la procédure d’instruction est irrégulière en raison des contacts gardés par Monsieur ZZZ et certains membres de la commission d’instruction avec Madame EEE ;
- le fait que Monsieur XXX aurait exercé des pressions à l’encontre de ses étudiantes n’est pas avéré et résulte d’un mensonge de Madame EEE qui n’aurait pas admis sa séparation avec Monsieur XXX ;
- la sanction prononcée à son encontre est disproportionnée ;
Par un mémoire en appel incident daté du 4 novembre 2022, reçu au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 15 novembre 2022 , puis par un mémoire en défense daté du 27 mars 2025, le président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne demande au Cneser statuant en matière disciplinaire d’annuler la décision de la section disciplinaire du conseil académique du 19 juillet 2022 et, par la voie de l’évocation, d’infliger à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur, pendant une durée de cinq ans, avec privation de la moitié du traitement ;
Il soutient que :
- la sanction doit également couvrir l’activité d’enseignement de Monsieur XXX dès lors que ce sont ses activités d’enseignement le mettant en contact avec les étudiants qui sont à l’origine des fait ;
- l’absence de mention de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation ne constitue pas un vice substantiel de nature à avoir influé sur le sens de la décision ;
- la décision est suffisamment motivée ;
- la section disciplinaire a statué sans convoquer à l’audience la présidente de l’université ;
- la section disciplinaire a irrégulièrement entendu des témoins par visioconférence ;
- la section disciplinaire a apprécié la nature et la gravité des fautes commises par Monsieur XXX dont le comportement personnel était incompatible avec la poursuite d’une activité dans la fonction publique et a porté atteinte à l’image et à la réputation du service ;
La commission d’instruction s’est tenue le 12 mars 2025. Monsieur XXX assisté de Maître Jacques Ferstenbert, avocat, ainsi que Madame Catherine Botoko, directrice des affaires juridiques et Mosnieur Arthur Souillac, chargé des affaires juridiques, représentant le président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ont été entendus ;
Par lettres recommandées du 7 avril 2025, Monsieur XXX ainsi que le président de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ont été régulièrement convoqués à l’audience du 22 mai 2025 ;
Le rapport d’instruction rédigé par Madame Nolwenn Peton a été communiqué aux parties par courriers recommandés, en même temps que la convocation à comparaître devant la formation de jugement ;
Monsieur XXX étant présent est assisté de Maître Jacques Ferstenbert, avocat ;
Le président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne étant représenté par Monsieur Arthur Souillac, chargé des affaires juridiques ;
Vu l’ensemble des pièces du dossier ;
Vu :
- le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8, R. 232-23 à R. 232-48 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- l’arrêté du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat ;
Après avoir entendu en séance publique le rapport de Madame Nolwenn Peton, rapporteure ;
Monsieur XXX ayant été informé de son droit de garder le silence à l’audience et de ne pas s’auto-incriminer ;
La parole ayant été donnée aux parties, Monsieur XXX ayant eu la parole en dernier ;
La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos sans que Madame Nolwenn Peton, rapporteure, n’intervienne ni n’ait voix délibérative ;
Considérant ce qui suit :
- Monsieur XXX est maître de conférences habilité à diriger des recherches, affecté à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Le 19 juillet 2022, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé une sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions de recherche, ainsi que d’encadrement de travaux de master et de doctorat, et de tutorat de stage, dans tout établissement public d’enseignement supérieur, pendant cinq ans, avec privation de la moitié du traitement. Monsieur XXX relève appel de cette décision. Par la voie de l’appel incident, le président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne demande au Cneser statuant en matière disciplinaire d’infliger à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur, pendant une durée de cinq ans, avec privation de la moitié du traitement ;
En ce qui concerne la régularité de la décision : - Il ressort des pièces du dossier que la section disciplinaire de l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne a entendu un témoin par visioconférence lors de l’audience du 1er juin 2022. Or aucune disposition du code de l’éducation ni aucun autre texte ni aucun principe général ne prévoit la possibilité pour les sections disciplinaires des conseils académiques des universités de recourir à des procédés de communication par visioconférence, même dans le cas où la présence physique d’une personne susceptible d’être entendue serait impossible. Dès lors, il ne peut qu’être constaté que la décision de la section disciplinaire du conseil académique de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne du 19 juillet 2022 a été rendue à l’issue d’une procédure irrégulière ;
- Il y a lieu, en conséquence, d’annuler cette décision et de se prononcer par la voie de l’évocation ;
En ce qui concerne la matérialité des faits et le caractère fautif de ces faits : - Aux termes de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version applicable à la date des faits litigieux : « Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. / (…) Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité (…) ». Aux termes de l’article 29 de la même loi du 13 juillet 1983 : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ». Et aux termes de l’article L. 952-2 du Code de l’éducation : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d'objectivité » ;
- Aux termes de l’article 12 de l’arrêté du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat : « « Sous la responsabilité des établissements accrédités, l'école doctorale fixe les conditions de suivi et d'encadrement des doctorants par une charte du doctorat dont elle définit les termes (...) ». Aux termes de l’article 16 de cet arrêté : « Le doctorant est placé sous la responsabilité d'un directeur de thèse. (...) » ;
- Il résulte de l’instruction que Monsieur XXX a demandé à certains doctorants dont il encadrait le travail de thèse de faire relire leurs écrits par un tiers avec lequel il était en relation. Monsieur XXX a ainsi précisé à la présidente de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne le 24 juin 2021 : « afin de me concentrer sur le fond des travaux qui me sont rendus, j’ai pour habitude de solliciter, avec l’accord de mes étudiants, l’appui d’un de mes anciens docteurs, Monsieur DDD, dont le travail consiste à vérifier l’aspect formel desdits travaux. Son aide est précieuse et permet un gain de temps non négligeable, surtout pour les doctorants étrangers dont la syntaxe est parfois imparfaite et la maîtrise des canons universitaires parfois incertaine ». Et Monsieur DDD indique dans une attestation établie le 5 juillet 2021 : « après l’obtention de mon doctorat en 2015, j’ai développé une offre de relecture et de correction de thèses et mémoires. J’ai même placardé des annonces à Paris 1. Lorsqu’il l’a su, Mosnieur XXX n’a pas hésité à orienter certains de ses étudiants, souvent étrangers, vers moi, d’autant plus qu’il a été mon co-directeur de thèse et apprécie mon travail et ma méthodologie. En effet, pour les étudiants qui me contactent sur ses recommandations, je commence d’abord par faire un voire deux comptes rendus afin qu’ils corrigent eux même leurs travaux (...) ». Monsieur XXX a précisé dans ses écritures que Monsieur DDD était par ailleurs chercheur associé au sein du département de recherche qu’il codirigeait et qu’ils intervenaient ensemble dans le cadre d’un projet sur le sport, Eyvol, bénéficiant de financements de la part de l’Union européenne ;
- Les échanges entre Monsieur XXX ou Monsieur DDD et les doctorants concernés ne laissent planer aucun doute sur la réalité et le contenu de la mission confiée par Monsieur XXX à Monsieur DDD. Ainsi ce dernier, le 20 juin 2018, écrivait à Madame CCC : « Monsieur XXX m’a demandé si j’acceptais de relire, corriger et réécrire au besoin certains passages de votre thèse et j’ai accepté ». Puis le 18 février 2019, il indiquait à Madame CCC : « Lors de notre entrevue à Paris, je vous ai demandé de lire des thèses et des livres sur votre sujet pour que vous puissiez avoir une idée sur le plan de votre thèse. Mais à la lecture de votre plan, il me semble que ce n’était pas fait. Peut-être que je me trompe ? J’ai l’impression que vous avez repris le même travail qu’avant en changeant juste l’emplacement et l’enchainement des intitulés. Je vous ai expliqué, et vous étiez d’accord, que votre plan dans ces deux parties doit refléter le titre de la thèse. (...) Or les intitulés de vos deux parties ne traitent pas de ça ! Je me rappelle vous avoir dit que vous pouvez garder tout ce qui concerne l’organisation judicaire et la théorie générale du contrat administratif à condition de les mettre dans l’introduction ou dans un chapitre préliminaire ... ». Enfin le 3 septembre 2019, Monsieur DDD insistait : « Avez-vous eu le temps de relire votre thèse ? S’agit-il vraiment de la bonne version ? Je vous prie de m’excuser mais pour moi il s’agit d’un brouillon. Beaucoup de travail reste à faire tant sur le fond que sur la forme ... ». Le même jour, Monsieur XXX précisait, de son côté : « Je m étonne de tout cela au même titre que Monsieur DDD. Vous ne devez prendre en compte que ses seules corrections. Et de personne d’autre. Par ailleurs, avant tout travail supplémentaire de sa part, je vous demande de lui régler ce que vous lui devez. J’ai personnellement demandé à Monsieur DDD de ne plus rien faire tant qu’il n’aura pas été réglé de son travail ». Enfin, dans un message adressé à Madame CCC le 16 septembre 2019, Monsieur XXX insistait : « Je pense que vous n’avez pas bien compris la situation. Ce n’est pas à vous de décider avec qui vous devez travailler. Je n’ai pas le temps de réécrire votre thèse et ce n’est pas mon rôle. J’ai fait le choix, avec beaucoup de magnanimité et de patience, de vous aider et de vous suivre en recourant aux services de Mosnieur DDD qui a toute ma confiance et qui s’est illustré par ses qualités de correcteur de thèse de doctorants étrangers à de multiples reprises. Sans lui, de nombreux étudiants n’auraient jamais pu soutenir leur thèse. Quant à ses remarques, elles sont tout à fait fondées. Si vous n’êtes pas en mesure de les entendre, c’est assez problématique et c’est là la preuve que vous n’êtes animée d’aucun esprit scientifique. Pour tout vous dire et être tout à fait clair, voilà déjà plusieurs fois que vous vous permettez de remettre en cause mes décisions. C’est la dernière fois et c’est la dernière chance que je vous offre. C’est Monsieur DDD qui procèdera à la relecture de votre thèse. Je n’ai aucune confiance dans les prétendus correcteurs spécialistes auxquels vous vous référez (...) J’espère avoir été clair. Si cette façon de procéder ne vous agrée pas, vous êtes libre de rechercher un nouveau directeur de thèse». S’agissant de la rémunération de son travail, Monsieur DDD écrivait à Madame CCC le 4 juillet 2018 : « pour une dernière fois, je suis toujours dans l’attente de mon dû. J’espère que ce ne sera pas nécessaire de la signaler encore une fois à Monsieur XXX ». Monsieur XXX indiquait encore à la même étudiante le 9 septembre 2019 : « je crois en effet que vous devez régler à Monsieur DDD les travaux qu’il a déjà effectués », puis le 13 septembre 2019 : « je vous demande de bien vouloir respecter scrupuleusement les instructions et les conseils de Monsieur DDD. Par ailleurs, je vous demande de bien vouloir lui régler ce que vous lui devez sans tarder ». Un autre étudiant, Monsieur AAA, précise dans une attestation du 8 mars 2025 : « Monsieur XXX m’avait recommandé de me faire relire par Mosnieur DDD. Ce qui fut fait. Mais compte tenu du fait que ce dernier devait recevoir quelque chose pour le temps qu’il y a consacré alors que doctorant je ne pouvais y répondre car sans revenus stables, les choses se sont compliquées (...) ». Et en effet, le 4 octobre 2021, Monsieur XXX écrit à Monsieur AAA : « Je vous demande donc, pour la troisième fois, de bien vouloir régler les sommes dérisoires que vous devez à Monsieur DDD, sommes dérisoires pour le travail qu’il a accompli et la disponibilité qui a été la sienne. Si vous aviez le moindre problème, il suffit de s’en expliquer ». Il résulte de l’instruction que, préalablement à ce message, Monsieur AAA a soumis son travail de thèse à Monsieur DDD qui a rendu un rapport directement adressé à Monsieur XXX en septembre 2020 abordant des questions de fond et mentionnant que sur la méthodologie l’auteur doit revoir 70 % de sa thèse. Le 22 décembre 2020, Monsieur XXX adresse un message à Monsieur AAA et Monsieur DDD précisant : « Cher DDD, merci pour ce compte-rendu complet. Monsieur AAA, merci de respecter scrupuleusement les suggestions de Monsieur DDD et de le régler pour son travail ». Les échanges ont ensuite perduré et, le 16 mars 2022, Monsieur DDD a établi un quatrième compte-rendu concernant la thèse de Monsieur AAA. Enfin il résulte de l’instruction, et notamment des témoignages de Madame BBB et de Monsieur DDD, que ce dernier a également procédé à la relecture de la thèse de Madame BBB ;
- Il apparait, à la lecture des échanges entre Monsieur XXX et ses étudiants, que celui-ci a imposé à ceux-là le recours aux services de Monsieur DDD à l’exclusion de tout autre correcteur et leur a régulièrement rappelé de rémunérer ce dernier avant que la soutenance de thèse ne puisse avoir lieu. En limitant sa mission d’encadrement personnel de ses étudiants alors que leur travail de recherche n’était pas achevé et en les mettant en relation avec un tiers, auquel il confiait de fait une mission de suivi des travaux de ces étudiants allant bien au-delà d’un travail de correction purement formel, et ce sans démontrer qu’il assurait personnellement le suivi régulier de ces travaux de recherches, Monsieur XXX n’a pas satisfait aux obligations de l’enseignant-chercheur et a méconnu les exigences d’impartialité, d’intégrité et de probité rappelées par les dispositions de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983. La circonstance que certains étudiants se seraient rendus coupables de plagiat ou que leurs travaux étaient d’une grande faiblesse, sur le plan de la rédaction comme sur le fond, n’atténue en rien les manquements ainsi commis par Monsieur XXX ;
- En revanche, si l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne reproche à Monsieur XXX d’avoir accueilli à son cabinet d’avocat des étudiantes dont il est par ailleurs l’enseignant, avec des pressions psychologiques renforçant le caractère anormal de cette situation, ces faits sont contestés par Monsieur XXX et ne sont établis par aucun élément ;
En ce qui concerne la sanction : - Aux termes de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation : « (…) les sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées aux enseignants-chercheurs et aux membres des corps des personnels enseignants de l’enseignement supérieur sont : 1° Le blâme ; 2° Le retard à l’avancement d’échelon pour une durée de deux ans au maximum ; 3° L’abaissement d’échelon ; 4° L’interdiction d’accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans au maximum ; 5° L’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche ou certaines d’entre elles dans l’établissement ou dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant cinq ans au maximum, avec privation de la moitié ou de la totalité du traitement ; 6° La mise à la retraite d’office ; 7° La révocation. Les personnes à l’encontre desquelles a été prononcée la sixième ou la septième sanction peuvent être frappées à titre accessoire de l’interdiction d’exercer toute fonction dans un établissement public ou privé, soit pour une durée déterminée, soit définitivement » ;
Eu égard à la gravité des fautes commises par Monsieur XXX, il y a lieu de prononcer une sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pour une durée de trois ans, avec privation de la moitié du traitement ;
Décide
Article 1 – La décision du 19 juillet 2022 de la section disciplinaire du conseil académique de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne est annulée.
Article 2 – Il est infligé à Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pour une durée de trois ans, avec privation de la moitié du traitement.
Article 3 – Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, au ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche. Copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Paris.
Délibéré à l’issue de la séance du 22 mai 2025, où siégeaient Monsieur Christophe Devys, président de section au Conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Monsieur Lilian Aveneau, Madame Marguerite Zani, Madame Véronique Benzaken, Monsieur Marcel Sousse, Madame Julie Dalaison, Madame Véronique Reynier, Monsieur Fabrice Guilbaud, Madame Agnès Cousson, Madame Anna Pappa, membres de la juridiction disciplinaire.
Fait à Paris le 7 juillet 2025,
Le président,
Christophe Devys
Le secrétaire, la vice-présidente étant empêchée,
Lilian Aveneau
Le greffier en chef,
Éric Mourou
Monsieur XXX
N° 1735
Monsieur Xavier Jégard
Rapporteur
Séance publique du 26 juin 2025
Décision du 7 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
Le président d’Aix-Marseille université a engagé le 26 octobre 2020, contre Monsieur XXX, maître de conférences affecté au sein de Polytech Marseille, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire compétente à l’égard des enseignants-chercheurs de son établissement ;
Par une décision du 25 juillet 2022, la section disciplinaire du conseil académique d’Aix-Marseille université compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé à l’endroit de Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement au sein d’Aix-Marseille université pendant un an, assortie de la privation de la moitié du traitement, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;
Par une déclaration d’appel du 25 septembre 2022, complété par des mémoires enregistrés les 14 mai et 2 septembre 2024 ainsi que les 1er et 22 juin 2025, Monsieur XXX, représenté par Maître Ludovic Heringuez, demande au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) statuant en matière disciplinaire, d’infirmer, en toutes ses dispositions, la décision rendue le 25 juillet 2022 par la section disciplinaire du conseil académique d’Aix-Marseille université, de rejeter la demande du président d’Aix-Marseille université de sanction à son endroit, d’enjoindre à l’établissement de rétablir le versement de la totalité de son traitement et enfin de condamner l’établissement à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des frais d’instance en application de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;
Monsieur XXX soutient que :
- en l’absence de formalisme particulier prescrit par l’article R. 712-44 du Code de l’éducation et en l’absence d’application du code de justice administrative, son appel est recevable ;
- la décision attaquée méconnait les dispositions de l’article R. 712-33 du Code de l’éducation dès lors que l’instruction aurait dû être rouverte en présence d’éléments nouveaux tirés de l’absence d’impartialité, empêchant la formation de jugement de statuer ;
- la décision attaquée méconnait les dispositions de l’article R. 712-26-1 du Code de l’éducation en ce qu’il n’a pas été tenu compte de sa demande de récusation de la présidente de la section disciplinaire ;
- le manquement au devoir de réserve ne faisait pas partie de la saisine du président d’Aix-Marseille université, laquelle devait être complète, en application des dispositions de l’article R. 712-30 du Code de l’éducation ; ce manquement n’a pas été évoqué au cours de l’audience du 6 juillet 2022 ;
- l’arrêté du 23 juillet 2020 du président d’Aix-Marseille université fixant le port obligatoire du masque présente un caractère douteux dès lors qu’à cette date il n’existait aucune recommandation imposant le port du masque ; l’obligation du port du masque à la rentrée universitaire n’était donc pas opposable ;
- la décision attaquée porte atteinte au principe à valeur constitutionnelle d’indépendance des enseignants-chercheurs, méconnaissant les dispositions des articles L. 952-2, L. 141-6, et L. 123-9 du Code de l’éducation ;
- la décision attaquée ne peut se fonder sur des témoignages anonymisés ;
- il n’a aucunement incité les étudiants à la désobéissance et n’a donc pas porté atteinte à l’ordre et au bon fonctionnement de l’établissement ;
- il n’a pas commis de manquement à l’obligation de réserve, laquelle est très assouplie pour les enseignants-chercheurs en raison de la garantie de leur indépendance qui est un principe fondamental reconnu par les lois de la République ; par ailleurs, le 10 septembre 2020, Madame YYY et Monsieur ZZZ ont commis une véritable voie de fait en l’empêchant d’accéder à sa salle de cours ;
- les allégations de Monsieur ZZZ selon lesquelles il aurait porté le masque autour du cou au moment des faits litigieux sont fausses ;
- la sanction est disproportionnée au regard des faits qui lui sont reprochés et des conséquences de son application sur sa situation financière ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 janvier 2023, le 28 juin 2024 et le 28 mars 2025, le président d’Aix-Marseille université, représenté par Maître Fabrice Sebagh, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Monsieur XXX la somme de 5 000 euros au titre de l’article 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;
Le président d’Aix-Marseille université soutient que :
- la juridiction disciplinaire est saisie in personam et non in rem ; la décision du Conseil d’État n° 425459 est applicable à l’ensemble des juridictions disciplinaires, y compris au Cneser statuant en matière disciplinaire ; en application de ces principes, le Cneser statuant en matière disciplinaire doit donc tenir compte de l’ensemble du comportement de Monsieur XXX, y compris des faits non décrits dans la saisine du 21 septembre 2020 ;
- la production de témoignages d’étudiants anonymisés ne fait pas obstacle à leur prise en compte par la juridiction dès lors que Monsieur XXX n’a pas été privé de la garantie d’assurer utilement sa défense ;
- le comportement de Monsieur XXX a eu des conséquences importantes sur la scolarité des étudiants ;
Par une décision du 18 janvier 2023, le Cneser statuant en matière disciplinaire a sursis à l’exécution de la sanction prononcée à l’endroit de Monsieur XXX le 25 juillet 2022 ;
La commission d’instruction s’est tenue le 26 mars 2025 ;
Par lettres recommandées du 18 avril 2025, Monsieur XXX, Maître Ludovic Heringuez, son Conseil ainsi que le président d’Aix-Marseille université, ont été régulièrement convoqués à l’audience du 5 juin 2025 ;
La formation de jugement ayant été reportée au 26 juin 2025 ; les parties ayant été avisées oralement de cette date et convoquées par courriers recommandés du 5 juin 2025 ;
Le rapport d’instruction rédigé par Monsieur Xavier Jégard ayant été communiqué aux parties par courriers recommandés en même temps que la convocation à comparaître devant la formation de jugement ;
Monsieur XXX étant présent et assisté de Maître Ludovic Heringuez, avocat ;
Le président d’Aix-Marseille université étant représenté par Me Fabrice Sebagh, avocat ;
Vu l’ensemble des pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
- le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8 et
R. 232-23 à R. 232-48 ; - le Code général de la fonction publique ;
- la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 ;
- le décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en séance publique le rapport de Monsieur Xavier Jégard, rapporteur, absent, lu par Madame Julie Dalaison désignée en qualité de secrétaire de séance ;
Monsieur XXX ayant été informé de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ;
La parole ayant été donnée aux parties, Monsieur XXX ayant eu la parole en dernier ;
Une note en délibéré a été transmise par Monsieur XXX le 4 juillet 2025, à l’issue de l’audience ;
La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos ;
Considérant ce qui suit :
- Monsieur XXX, maitre de conférences à Polytech Marseille (école d’ingénieurs d’Aix-Marseille université) a fait l’objet d’une procédure disciplinaire diligentée par le président d’Aix-Marseille université le 26 octobre 2020. Il relève appel de la décision du 25 juillet 2022 par laquelle la section disciplinaire du conseil académique d’Aix-Marseille université a prononcé à son endroit la sanction d’interdiction d’exercer toute fonction d’enseignement au sein d’Aix-Marseille université pendant un an avec privation de la moitié du traitement et a assorti cette sanction de l’exécution immédiate nonobstant appel ;
Sur la régularité de de la décision de première instance : - Aux termes de l’article R. 712-30 du Code de l’éducation : « La section disciplinaire est saisie par une lettre adressée à son président par tout moyen permettant de conférer date certaine. Ce document mentionne le nom, l'adresse et la qualité des personnes faisant l'objet des poursuites ainsi que les faits qui leur sont reprochés. Il est accompagné de toutes pièces justificatives recensées dans un bordereau récapitulatif » ;
- Les juridictions disciplinaires, saisies d’une plainte contre un enseignant-chercheur, peuvent légalement connaitre de l’ensemble du comportement professionnel de l’intéressé, sans se limiter aux faits dénoncés dans la plainte ni aux griefs articulés par le plaignant. À ce titre, il leur est loisible de se fonder, pour infliger une sanction à un enseignant-chercheur, sur des griefs nouveaux, à condition toutefois d’avoir mis au préalable l’intéressé à même de s’expliquer sur ces griefs ;
- Il résulte du courrier de saisine de la section disciplinaire du conseil académique d’Aix-Marseille université en date du 26 octobre 2020 que le grief reproché à Monsieur XXX est le suivant : « Attitude de nature à porter atteinte à l’ordre et au bon fonctionnement de l'établissement liée [à] un refus d'appliquer les consignes communiquées et affichées par l’établissement dans le contexte sanitaire actuel et notamment son refus revendicatif du port du masque. » Toutefois, la décision de première instance retient également comme grief le manquement par Monsieur XXX à l’obligation de réserve qui s’imposait à lui. Or il ne résulte pas de l’instruction que Monsieur XXX ait été mis à même de s’exprimer sur ce manquement. Il suit de là qu’il est fondé à soutenir que la section disciplinaire du conseil académique de l’université d’Aix-Marseille a méconnu le principe général du droit applicable à toutes les juridictions administratives, d’après lequel la procédure doit revêtir un caractère contradictoire ;
- Il y a lieu en conséquence pour le conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire d’annuler la décision de première instance et de se prononcer immédiatement par la voie de l’évocation sur les poursuites disciplinaires engagées contre Monsieur XXX ;
Sur les griefs formulés par le président d’Aix-Marseille université : - Aux termes de l’article L. 121-10 du Code général de la fonction publique : « L'agent public doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public » ;
- Aux termes de l’article L. 952-2 du Code de l’éducation : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d'objectivité./Les libertés académiques sont le gage de l'excellence de l'enseignement supérieur et de la recherche français. Elles s'exercent conformément au principe à caractère constitutionnel d'indépendance des enseignants-chercheurs ». Selon l’article L. 141-6 du même Code : « Le service public de l'enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l'objectivité du savoir ; il respecte la diversité des opinions. Il doit garantir à l'enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique ». L’article L. 123-9 de ce code énonce : « À l'égard des enseignants-chercheurs, des enseignants et des chercheurs, les universités et les établissements d'enseignement supérieur doivent assurer les moyens d'exercer leur activité d'enseignement et de recherche dans les conditions d'indépendance et de sérénité indispensables à la réflexion et à la création intellectuelle. » ;
- En premier lieu, il résulte de l’instruction que Monsieur XXX a délibérément refusé le port du masque, notamment lors de ses premiers enseignements de l’année universitaire 2020-2021, entre le 4 et 10 septembre 2020, alors même que le port du masque était rendu obligatoire par l’article 34 du décret du 10 juillet 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans les territoires sortis de l’état d’urgence sanitaire et dans ceux où il a été prorogé, lequel n’avait pas pour objet et n’a pas eu pour effet de restreindre les libertés d’expression et d’opinion ou le principe d’indépendance des enseignants-chercheurs dans leur domaine d’activité ;
- En deuxième lieu, les agents publics sont tenus au devoir de réserve. Ce principe désigne l’obligation qui leur est faite de faire preuve de réserves et de retenue dans l’expression de leurs opinions personnelles. Or il résulte de l’instruction et notamment des échanges tenus lors de la commission d’instruction du 26 mars 2025 que Monsieur XXX a communiqué, au début de la procédure disciplinaire, auprès de certains médias un support qui comportait l’adresse de courrier électronique de la présidente de la section disciplinaire de l’université afin que ses soutiens puissent directement la contacter. Ce faisant, Monsieur XXX a méconnu son obligation de réserve ;
- En troisième lieu, en raison du refus du port du masque opposé le 10 septembre 2020 par Monsieur XXX, du report des cours qui s’en est suivi, des nouveaux refus de porter le masque opposés lors des nouvelles dates de cours et du refus de Monsieur XXX de dispenser ses enseignements en mode « distanciel », les enseignements que devait assurer Monsieur XXX durant l’année universitaire 2020/2021 n’ont pu être assurés. Il s’ensuit que le comportement de Monsieur XXX a fortement désorganisé le service et a privé les étudiants concernés de cours qui leur étaient nécessaires ;
- Il résulte de ce qui a été dit du point 8 au point 10 que les comportements répétés de Monsieur XXX, constitutifs de manquements à ses obligations déontologiques, sont fautifs ;
Sur la sanction : - Aux termes de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation : « Sous réserve des dispositions prises en application de l'article L. 952-23, les sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées aux enseignants-chercheurs et aux membres des corps des personnels enseignants de l'enseignement supérieur sont : / 1° Le blâme ; / 2° Le retard à l'avancement d'échelon pour une durée de deux ans au maximum ; / 3° L'abaissement d'échelon ; / 4° L'interdiction d'accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans au maximum ; / 5° L'interdiction d'exercer toutes fonctions d'enseignement ou de recherche ou certaines d'entre elles dans l'établissement ou dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant cinq ans au maximum, avec privation de la moitié ou de la totalité du traitement ; / 6° La mise à la retraite d'office ; / 7° La révocation. / Les personnes à l'encontre desquelles a été prononcée la sixième ou la septième sanction peuvent être frappées à titre accessoire de l'interdiction d'exercer toute fonction dans un établissement public ou privé, soit pour une durée déterminée, soit définitivement » ;
- Eu égard à la gravité des fautes commises par Monsieur XXX, il est infligé à ce dernier la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement au sein d’Aix-Marseille université pendant six mois, avec privation de la moitié du traitement ;
Sur les frais d’instance : Les dispositions de l’article 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de Monsieur XXX, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Aix-Marseille université au titre des frais de justice. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge d’Aix-Marseille université la somme demandée par Monsieur XXX au même titre ;
Décide
Article 1 – La décision du 25 juillet 2022 de la section disciplinaire du conseil académique d’Aix-Marseille université compétente à l’égard des enseignants-chercheurs prononçant à l’endroit de Monsieur XXX la sanction d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement en son sein pendant un an, assortie de la privation de la moitié du traitement, est annulée.
Article 2 – Monsieur XXX est sanctionné d’une interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement au sein d’Aix-Marseille université pendant six mois, avec privation de la moitié du traitement.
Article 3 – Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président d’Aix-Marseille université, au ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie d’Aix-Marseille.
Délibéré à l’issue de la séance du 26 juin 2025, où siégeaient Monsieur Christophe Devys, président de section au Conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Madame Frédérique Roux, Madame Marguerite Zani, Monsieur Marcel Sousse, Madame Julie Dalaison, Madame Véronique Reynier, membres de la juridiction disciplinaire.
Fait à Paris le 7 juillet 2025,
Le président,
Christophe Devys
La vice-présidente,
Frédérique Roux
Le greffier en chef,
Éric Mourou
Monsieur XXX
N° 1738
Monsieur Joël Seytel
Rapporteur
Séance publique du 5 juin 2025
Décision du 7 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
Le président de l’université Lumière Lyon 2 a engagé le 21 janvier 2022, contre Monsieur XXX, maître de conférences affecté à la faculté de droit et doyen de cette faculté, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 compétente à l’égard des enseignants-chercheurs ;
Par une décision du 27 septembre 2022, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 compétente à l’égard des enseignants-chercheurs a prononcé à l’encontre de Monsieur XXX la sanction de la révocation, décision immédiatement exécutoire nonobstant appel ;
Par une déclaration d’appel du 24 novembre 2022, Monsieur XXX, représenté par Maître Karin Hammerer, demande au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) statuant en matière disciplinaire d’annuler le jugement rendu le 27 septembre 2022 par la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 et de ramener à de plus justes proportions la sanction qui lui a été infligée ;
Monsieur XXX soutient que :
le jugement contesté méconnaît les principes d’impartialité et de séparation des pouvoirs des articles 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
la sanction infligée repose sur des faits matériellement inexacts ;
elle est disproportionnée eu égard aux fautes commises ;
Par un mémoire en défense réceptionné au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 28 mai 2024, la présidente de l’université Lumière Lyon 2, représentée par Maître Clémentine Lacoste, demande au Cneser statuant en matière disciplinaire de rejeter la requête en appel de Monsieur XXX et de confirmer la sanction qui lui a été infligée en première instance ;
Le président de l’université Lumière Lyon 2 soutient que les moyens soulevés par Monsieur XXX ne sont pas fondés ;
Par un mémoire en réplique réceptionné au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 23 août 2024, Monsieur XXX reprend ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et sollicite avant dire droit que le Cneser statuant en matière disciplinaire sursoit à statuer dans l’attente de l’ordonnance de règlement du juge d’instruction saisi du volet pénal de ce dossier ;
Par un mémoire complémentaire en défense réceptionné au greffe du Cneser statuant en matière disciplinaire le 21 mai 2025, le président de l’université Lumière Lyon 2 reprend ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;
La commission d’instruction s’est tenue le 26 mars 2025 ;
Par lettres recommandées du 6 mai 2025, Monsieur XXX, Maître Karin Hammerer, son conseil, ainsi que le président de l’université Lumière Lyon 2, ont été régulièrement convoqués à l’audience du 5 juin 2025 ;
Le rapport d’instruction rédigé par Monsieur Joël Seytel ayant été communiqué aux parties par courriers recommandés en même temps que la convocation à comparaître devant la formation de jugement ;
Monsieur XXX étant présent ;
Le président de l’université Lumière Lyon 2 étant représenté par Maître Clémentine Lacoste, avocate ;
Vu l’ensemble des pièces du dossier ;
Vu le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8 et
R. 232-23 à R. 232-48 ;
Après avoir entendu en séance publique le rapport de Monsieur Joël Seytel, rapporteur.
Monsieur XXX ayant été informé de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ;
La parole ayant été donnée aux parties, Monsieur XXX ayant eu la parole en dernier ;
La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos sans que Monsieur Seytel, rapporteur, n’intervienne ni n’ait voix délibérative ;
Considérant ce qui suit :
La présidente de l’université Lumière Lyon 2 a engagé, devant la section disciplinaire du conseil académique de cet établissement, des poursuites disciplinaires à l’encontre de Monsieur XXX, maître de conférences affecté à la faculté de droit et doyen de cette faculté, lui reprochant des comportements contraires à la dignité et à la déontologie par usage de ses fonctions de doyen et des moyens afférents pour avoir des relations sexuelles avec une étudiante dans l’enceinte de l’établissement, pour s’adjoindre les services de l’étudiante, pour ne pas s’être déporté dans l’examen d’une demande de saisine de la section disciplinaire qui la concernait et avoir ainsi porté atteinte à la réputation de l’université. Par un jugement du 27 septembre 2022, la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 a infligé à Monsieur XXX la sanction de la révocation. Monsieur XXX demande au Cneser statuant en matière disciplinaire d’annuler cette décision ;
Sur la régularité de la décision de première instance :Aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Aux termes du paragraphe 1 de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de tout accusation en matière pénale dirigée contre elle. (…) » ;
Les fonctions dévolues à la commission d’instruction des sections disciplinaires des conseils académiques des établissements publics d’enseignement supérieur par les dispositions de l’article R. 712-33 du Code de l’éducation ne diffèrent pas de celles que la formation collégiale de jugement pourrait elle-même exercer. Ainsi, les fonctions des membres de la commission d’instruction ne font pas obstacle à ce que ces derniers participent au délibéré de la formation de jugement dans le respect de l’exigence des principes d’impartialité et de séparation des pouvoirs prévus par les dispositions et stipulations citées au point précédent. Dans ces conditions, Monsieur XXX n’est pas fondé à soutenir que la décision attaquée de la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lumière Lyon 2 serait irrégulière au motif que les membres de la commission d’instruction ont siégé au sein de la formation de jugement ;
Sur le bien-fondé de la décision de première instance :Aux termes de l’article L. 121-1 du Code général de la fonction publique : « L’agent public exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité ». Le quatrième alinéa de l’article L. 123-6 du Code de l’éducation assigne au service public de l’enseignement supérieur la promotion « des valeurs d’éthique, de responsabilité et d’exemplarité ». Aux termes de l’article L. 530-1 du Code général de la fonction publique : « Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ». Aux termes de l’article L. 952-8 du Code de l’éducation : « (...) les sanctions disciplinaires qui peuvent être appliquées aux enseignants-chercheurs et aux membres des corps des personnels enseignants de l’enseignement supérieur sont : / 1° Le blâme ; / 2° Le retard à l’avancement d’échelon pour une durée de deux ans au maximum ; / 3° L’abaissement d’échelon ; / 4° L’interdiction d’accéder à une classe, grade ou corps supérieurs pendant une période de deux ans au maximum ; / 5° L’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche ou certaines d’entre elles dans l’établissement ou dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant cinq ans au maximum, avec privation de la moitié ou de la totalité du traitement ; / 6° La mise à la retraite d’office ; / 7° La révocation (…) » ;
Il est constant, en premier lieu, que Monsieur XXX a engagé à compter de juin 2018 une relation étroite avec l’une de ses étudiantes, Madame YYY, alors en première année de licence, en utilisant les moyens mis à sa disposition en qualité de doyen, notamment le compte Facebook de l’université et, en deuxième lieu, que cette relation s’est poursuivie de manière discontinue jusqu’au mois de novembre 2021, Monsieur XXX usant de son autorité pour relancer leurs échanges lorsque ceux-ci s’interrompaient et, en troisième lieu, que, durant cette période, Monsieur XXX et Madame YYY ont eu de nombreux rapports sexuels dans l’enceinte de l’établissement, dans des lieux divers et souvent inaccessibles aux étudiants. Il ressort également des pièces du dossier que Madame YYY a été plusieurs fois hospitalisée en établissement psychiatrique, notamment en janvier 2019, et que, dans un rapport d’expertise daté de juin 2022, le psychiatre, expert près la cour d’appel de Lyon, mandaté par la commission d’instruction a relevé qu’il « existait un lien asymétrique (entre Madame YYY et Monsieur XXX) en raison de leur différence d’âge et de statut » ; que « ce lien asymétrique a influé sur leurs relations » ; qu’au regard de l’état psychologique de Madame YYY, connu de Monsieur XXX, son discernement pouvait être altéré». Si Madame YYY se disait amoureuse et n’a jamais nié le caractère consenti de la relation que Monsieur XXX a instituée avec elle, elle n’en a pas moins porté plainte ultérieurement contre lui, faisant état de violences sexuelles dont elle aurait été victime. Il résulte de ce qui précède que Monsieur XXX a tiré avantage de son statut d’enseignant-chercheur et de doyen de la faculté de droit pour initier une relation avec une étudiante en première année de licence, dotée d’une certaine fragilité psychologique, et poursuivre sur plus de trois ans cette relation, marquée par de multiples ébats sexuels dans les locaux de l’université, avec un sentiment manifeste d’impunité. Ces agissements, radicalement contraires aux valeurs de responsabilité, d’exemplarité et de dignité qui s’imposaient à lui, en qualité d’enseignant-chercheur et a fortiori de doyen de la faculté de droit, sont constitutifs d’une faute disciplinaire ;
Il est, par ailleurs, établi qu’en mars 2019, un professeur du département de droit a écrit à Monsieur XXX, en sa qualité de responsable de ce département, pour lui faire part d’un acte de plagiat effectué par Madame YYY et pour envisager une procédure disciplinaire à l’encontre de celle-ci, que Monsieur XXX, ne voulant pas faire état des relations qu’il avait avec cette étudiante, s’est gardé de se déporter et a simplement demandé à Madame YYY de faire des excuses, ce qui a mis fin à l’engagement de poursuites alors que cette dernière aurait pu faire l’objet d’une sanction par la commission disciplinaire de l’université. Il ressort également des pièces du dossier que, durant l’année 2019/2020, Monsieur XXX, a récupéré la copie de droit constitutionnel de Madame YYY afin de la corriger lui-même, en lui attribuant la note de 12/20, alors que l’intéressée n’était pas affectée dans son groupe mais dans celui d’un autre enseignant. Il est établi, au surplus, qu’en 2018, Monsieur XXX a envisagé de confier à Madame YYY des fonctions d’assistant de recherche alors que cette dernière finissait tout juste sa première année de licence et n’apparaissait pas comme un excellent élève. S’il n’est pas prouvé que c’est l’intervention de Monsieur XXX qui a interrompu les poursuites disciplinaires à l’encontre de Madame YYY ou que Monsieur XXX aurait surévalué la copie de droit constitutionnel de cette dernière et si finalement celle-ci ne s’est pas vu confier de fonctions d’assistant de recherche, il n’en est pas moins établi que, loin de se déporter dans les affaires concernant Madame YYY, Monsieur XXX a traité personnellement ces affaires, alors que sa proximité avec cette étudiante aurait dû l’en empêcher, et leur a réservé un traitement particulier, méconnaissant ainsi le principe d’égalité des usagers devant le service public ;
L’ensemble de ces agissements, matériellement établis par les pièces du dossier et connus par ailleurs de quelques membres de l’université, constituent des manquements à l’exigence de dignité de l’article L. 121-1 du Code général de la fonction publique, portent atteinte à la réputation du service public de l’enseignement supérieur, auquel le législateur a assigné la mission de promouvoir les « valeurs d’éthique, de responsabilité et d’exemplarité » et apparaissent ainsi constitutifs d’une faute disciplinaire ;
En raison de la gravité des faits ainsi établis et en dépit de l’absence de sanction antérieure prononcée à son encontre et de la qualité des services qu’il a rendus dans l’exercice de ses fonctions, Monsieur XXX n’est pas fondé à soutenir que la section disciplinaire du conseil académique de l’université Lyon Lumière 2 aurait pris une sanction disproportionnée en décidant de le révoquer ;
Il résulte de tout ce qui précède que Monsieur XXX n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision qu’il conteste ou à ce que la sanction qui lui a été infligée par l’université Lyon Lumière 2 soit réduite ;
Décide
Article 1 – La requête de Monsieur XXX est rejetée.
Article 2 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à la présidente de l’université Lumière Lyon 2, au ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Lyon.
Délibéré à l’issue de la séance du 5 juin 2025, où siégeaient Monsieur Christophe Devys, président de section au Conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Madame Frédérique Roux, Monsieur Lilian Aveneau, Madame Marguerite Zani, Madame Véronique Reynier, Monsieur Fabrice Guilbaud, membres de la juridiction disciplinaire.
Fait à Paris le 7 juillet 2025,
Le président,
Christophe Devys
La vice-présidente,
Frédérique Roux
Le greffier en chef,
Éric Mourou
Monsieur XXX
N° 1840
Séance publique du 3 juillet 2025
Décision du 7 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
La présidente de l’université de Poitiers a engagé le 7 mai 2025, contre Monsieur XXX, maître de conférences en biomécanique, affecté à l’UFR des sciences du sport de l’université de Poitiers, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de l’établissement compétente à l’égard des enseignants-chercheurs et des enseignants de son établissement ;
Par un courrier du 28 mai 2025, Monsieur XXX représenté par Maître Jenna Brown demande au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) statuant en matière disciplinaire le dessaisissement de la section disciplinaire compétente à l’égard des enseignants-chercheurs et des enseignants de l’université de Poitiers, désignée pour connaître son dossier disciplinaire ;
Monsieur XXX rappelle qu’il a fait l’objet d’une précédente saisine de la section disciplinaire de son établissement pour des faits de menace de mort qu’il aurait perpétrés à l’encontre de la présidente de l’université de Poitiers et que le Cneser statuant en matière disciplinaire a, par une précédente décision du 30 avril 2025, délocalisé la connaissance de ce dossier à la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Nantes. Monsieur XXX soutient, d’une part, que les faits qui lui sont reprochés constituent en eux-mêmes une raison objective de mettre en doute l’impartialité de la section disciplinaire de l’université de Poitiers car l’université a des intérêts distincts et personnels dans ce litige et ne peut pas être à la fois juge et partie, d’autre part, qu’il a engagé une procédure pénale pour harcèlement moral dont il serait victime du fait de l’université, qui est en cours d’instruction, si bien qu’il existe une suspicion légitime sur le risque de partialité de la section disciplinaire du conseil académique de l’université, et enfin que, dès lors que la précédente procédure de dépaysement qui avait été initiée par la présidente de l’université de Poitiers elle-même en raison de la partialité de trois des membres de la section disciplinaire, avait été retenue par la décision du 30 avril 2025 du Cneser statuant en matière disciplinaire et que la composition de la section disciplinaire n’a pas changé, il convient de dépayser cette seconde procédure pour ce même motif ;
Par un mémoire en défense daté du 23 juin 2025, la présidente de l’université de Poitiers demande au Cneser statuant en matière disciplinaire de rejeter la demande de dépaysement de Monsieur XXX ;
Par un mémoire en réplique daté du 2 juillet 2025, Monsieur XXX reprend les mêmes conclusions par les mêmes moyens ;
Par lettres recommandées du 6 juin 2025, Monsieur XXX, Maître Jenna Brown, son avocate et la présidente de l’université de Poitiers, ont été régulièrement convoqués à l’audience du 3 juillet 2025 ;
Monsieur XXX et Maître Jenna Brown étant absents et excusés ;
La présidente de l’université de Poitiers étant représentée par Monsieur Przemyslaw Sokolski, directeur des affaires juridiques ;
Vu l’ensemble des pièces du dossier ;
Vu le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2 à L. 232-7, L. 952-8,
R. 232-23 à R. 232-48 et R. 712-27-1 ;
La formation de jugement du Cneser statuant en matière disciplinaire ayant délibéré à huis clos ;
Considérant ce qui suit :
- aux termes du premier alinéa de l’article R. 712-27-1 du Code de l’éducation : « S’il existe une raison sérieuse de mettre en doute l’impartialité de la section disciplinaire initialement saisie dans son ensemble, l’examen des poursuites peut être attribué à la section disciplinaire d’un autre établissement » ;
- aucun des moyens invoqués par Monsieur XXX n’est de nature à faire naître un doute sérieux quant à l’impartialité de la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Poitiers ;
ainsi, ne sont pas réunies les conditions fixées par les dispositions précitées de l’article R. 712-27-1 du Code de l’éducation, pour attribuer l’examen des poursuites disciplinaires engagées contre Monsieur XXX à la section disciplinaire d’un autre établissement ;
Décide
Article 1 – La demande de dépaysement déposée par Monsieur XXX est rejetée.
Article 2 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232-41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, à la présidente de l’université de Poitiers, au ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ; copie sera adressée, en outre, au recteur de l’académie de Poitiers.
Délibéré à l’issue de la séance du 3 juillet 2025, où siégeaient Monsieur Christophe Devys, président de section au Conseil d’État, président du Cneser statuant en matière disciplinaire, Madame Frédérique Roux, Madame Agnès Cousson, Madame Pascale Gonod, Madame Véronique Reynier et Monsieur Fabrice Guilbaud, membres de la juridiction disciplinaire.
Fait à Paris 7 juillet 2025,
Le président,
Christophe Devys
La vice-présidente,
Frédérique Roux
Le greffier en chef,
Éric Mourou
Monsieur XXX
N° 1841
Décision du 7 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
Le président de l’université de Lille a engagé le 17 mars 2025, contre Monsieur XXX, maître de conférences affecté au département de chimie de la faculté des sciences et technologie de l’université de Lille, des poursuites disciplinaires devant la section disciplinaire du conseil académique de l’établissement compétente à l’égard des enseignants-chercheurs et des enseignants ;
Par un courrier du 5 juin 2025, le président de l’université de Lille demande au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) statuant en matière disciplinaire le dessaisissement de la section disciplinaire compétente à l’égard des enseignants-chercheurs et des enseignants de l’université de Lille, désignée pour connaître le dossier disciplinaire de Monsieur XXX ;
Le président de l’université de Lille soutient d’une part que « des interventions sont survenues en dehors du cadre réglementaire relatif à la procédure disciplinaire » et que d’autre part, le président de la section disciplinaire l’a alerté le 28 mai 2025 que « des faits risquent de mettre à mal la bonne tenue des séances de la section disciplinaire » ;
Vu l’ensemble des pièces du dossier ;
Vu le Code de l’éducation, notamment ses articles L. 232-2, R. 232-35 et R. 712-27-1 ;
Considérant ce qui suit :
aux termes de l’article R. 232-35 du Code de l’éducation, « le président peut donner acte des désistements, rejeter les requêtes ne relevant manifestement pas de la compétence du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche statuant en matière disciplinaire ou entachées d’une irrecevabilité manifeste et constater qu’il n’y a pas lieu à statuer » ;
aux termes du premier alinéa de l’article R. 712-27-1 du Code de l’éducation : « S’il existe une raison sérieuse de mettre en doute l’impartialité de la section disciplinaire initialement saisie dans son ensemble, l’examen des poursuites peut être attribué à la section disciplinaire d’un autre établissement » ; aux termes du deuxième alinéa de ce même article « La demande de renvoi à une autre section disciplinaire peut être formée par la personne poursuivie, par le président de l’université, par le recteur de région académique ou par le médiateur académique dans le délai de quinze jours à compter de la réception par ceux-ci du document mentionné au premier alinéa de l’article R. 712-31 » ;
le document ainsi mentionné au premier alinéa de l’article R. 712-31, qui renvoie lui-même à l’article R. 712-30, est, aux termes de ce dernier article, la lettre par laquelle le président de la section disciplinaire est saisi, qui mentionne le nom, l’adresse et la qualité des personnes qui font l’objet des poursuites ainsi que les faits qui leur sont reprochés ;
il ressort des pièces du dossier que le président de la section disciplinaire du conseil académique de l’université de Lille a été saisi le 17 mars 2025 ; que la demande de dessaisissement du président de l’université de Lille est datée du 5 juin 2025 ; qu’au regard du délai de quinze jours mentionné ci-dessus, elle est donc tardive et, par suite, irrecevable ;
Décide
Article 1 – La demande de dépaysement du président de l’université de Lille du dossier disciplinaire de Monsieur XXX est rejetée.
Article 2 – Dans les conditions fixées aux articles R. 232- 41 et R. 232-42 du Code de l’éducation susvisé, la présente décision sera notifiée à Monsieur XXX, au président de l’université de Lille, au ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche et publiée, sous forme anonyme, au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche ;copie sera adressée, en outre, à la rectrice de l’académie de Lille.
Fait à Paris le 7 juillet 2025,
Le président,
Christophe Devys
Le greffier en chef,
Éric Mourou
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