Néandertal à la plage. Nos frères disparus dans un transat, Silvana Condemi et Jean-François Mondot (Dunod)
Néandertal a définitivement cessé d’être un Autre quand nous avons appris qu’il enterrait certains de ses morts et prenait soin de ses malades. La recherche nous apporte également des preuves que Sapiens et Néandertal se sont fréquentés, puisque 2 % de nos gènes nous viennent de lui. Une proximité qui rend sa disparition encore plus troublante et énigmatique. Installez-vous confortablement dans un transat et laissez-vous conter par Silvana Condemi, paléontologue, directrice de recherche au CNRS, au sein du laboratoire ADES rattaché à l 'université de Marseille et à l’Établissement français du sang, et Jean-François Mondot, rédacteur permanent aux Cahiers de Science et Vie, l’étonnante histoire de nos frères disparus.
Interview
Où cet ouvrage vous a-t-il emmenée (géographiquement) ? Avec qui avez-vous collaboré pour l'écrire ?
Silvana Condemi : Cet ouvrage est le fruit de travaux qui s’étalent sur plus de 30 ans d’études. Mes recherches ont commencé lors de ma thèse et se sont développées tout au long de ma carrière d’abord au Muséum national d’Histoire naturelle, à Paris, puis au CNRS. Au cours de mon activité de chercheur qui m’a permis de contribuer à la connaissance de cette population fossile, j’ai eu la joie de participer à de très nombreuses fouilles en Europe et au Proche-Orient et de mettre au jour des fossiles nouveaux ; j’ai parcouru l’Europe, le Proche-Orient et l’Afrique afin d’étudier dans les musées et les centres et laboratoires de recherche le moindre petits restes fossiles me permettant de reconstituer l’histoire évolutive des Néandertaliens de leur origine à leur disparition lors de l’arrivée de notre espèce Homo sapiens. Cette quête m’a permis de voyager, d’échanger avec des collègues, de me faire des amis. Ce livre écrit avec Jean François Mondot, historien et journaliste, en est l’illustration. Les Néandertaliens ont en quelques mots façonné ma vie.
Quelle découverte récente vous a le plus marqué ou a changé votre perception de Néandertal ?
S. C. : Avec des collègues hématologues, généticiens et généticiens des populations, nous avons voulu connaître la diversité génétique des groupes sanguins de Néandertaliens et des autres fossiles qui vivaient en Eurasie. J’ai été éblouie par l’histoire que raconte les groupes sanguins de Néandertal : ils montrent leur origine africaine, leur grande homogénéité sur un très vaste territoire géographique allant de l’Atlantique à la Sibérie, mais aussi leur fragilité démographique et aux pathogènes qui nous entourent. C’est une étude qui n’aurait pas été possible lorsque j’ai commencé mes études et que l’on doit à l’introduction de la paléogénétique dans ma discipline : la paléoanthropologie.
Qu’est-ce que Néandertal nous apprend sur nous-mêmes et sur l'évolution ?
S. C. : Les populations humaines n’ont jamais été complètement séparées les unes des autres et cela même pendant la préhistoire. Elles se sont toujours rencontrées, ont eu des échanges culturels. Elles ont parfois même mélangé leur gènes comme le montre le petit pourcentage de gènes Néandertaliens chez les Européens et Denisoviens chez les asiatiques d’aujourd’hui.
Le Goût des sciences
Le Goût des sciences est un prix littéraire qui récompense, depuis 2009, les meilleures publications de médiation scientifique. Il entend réaffirmer la place des sciences au cœur de la société en mettant en lumière le travail de recherche et en suscitant des vocations. Le Goût des sciences a pour ambition de rendre la science accessible au grand public en distinguant les travaux des chercheurs et des experts.
Cette année, le jury du Prix Le Goût des sciences a sélectionné 15 ouvrages dans la catégorie du prix du livre scientifique et 16 dans la catégorie jeunesse. Tous répondent à un objectif commun : rendre accessible les sciences en vulgarisant le savoir scientifique sans pour autant lui faire perdre de son exactitude autour de thèmes riches et variés.