Publié le 21.11.2017

5èmes rencontres des maladies rares : discours de Frédérique Vidal

Frédérique Vidal s'est exprimée à l'occasion des 5èmes rencontres des maladies rares lundi 20 novembre 2017.

Biostructures-et-découverte-de-médicament

SEUL LE PRONONCE FAIT FOI

Je suis très heureuse d’intervenir au cours de ces 5emes rencontres des maladies rares, en introduction de cette session consacrée à la question majeure de la collecte et du traitement des données dans les maladies rares. 

Nous avons, la ministre des Solidarités et de la Santé, qui est intervenue auprès de vous ce matin et moi-même relancé la réflexion sur la structuration de tous les aspects relatifs aux maladies rares pour la période 2017-2022. Cette réflexion a été pilotée par le Professeur Lévy, président d’Aviesan et le Professeur Sylvie Odent et beaucoup d’entre vous y ont participé. Je veux ici vous en remercier. 

Le champ des maladies rares est l’un de ceux ou l’intrication de l’activité clinique et de l’activité de recherche est forte et nos organisations doivent être optimisées pour répondre à la fois à ces deux enjeux. C’est aussi l’un de ceux ou la tension entre la nécessité que tous aient accès à l’innovation partout sur le territoire, et la nécessité de regrouper les forces pour développer une expertise, repérer les similarités entre deux situations cliniques, constituer des cohortes de patients, et leur proposer de les inclure dans des essais cliniques est la plus importante, du fait de la rareté des maladies. Ces deux caractéristiques ont déterminé la construction des plans maladies rares précédents ainsi que la réflexion actuelle. Cette réflexion est d’autant plus importante qu’elle est peut être préfiguratrice de modes de pensée que nous devrons rapidement appliquer à beaucoup d’autres maladies, que nous jugeons fréquentes car nous ne savons pas les distinguer les unes des autres, mais que la médecine personnalisée pourrait éclater en une multitude de situations plus précisément définies, et plus rares. 

Je voudrais cet après-midi aborder avec vous 3 enjeux déterminants pour la recherche et l’innovation dans le champ des maladies rares.

Le premier, auquel est consacré votre session est celui de la collecte de données. La base de données maladies rares déployée dans le cadre du 2eme plan a commencé à structurer la collecte de certains types de données. Il faut maintenant que nous transformions cet essai, pour permettre une utilisation optimale, tant dans un objectif de diagnostic que de recherche. Nos actions doivent être cohérentes et il est décisif que le lien entre les données cliniques recueillies au cours du parcours de soins, et les données génomiques qui seront produites par les plateformes de séquençage que le gouvernement a financées dans le cadre du lancement du Plan France Médecine Génomique 2025 soit effectif. Nous devons  relever le défi de l’interopérabilité, notamment avec nos voisins européens. Le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation apportera toute son expertise et son soutien à la structuration de ces actions sur la période 2017-2022. 

Dans de nombreux champs en santé, le niveau pertinent d’organisation de la recherche est européen, et la France doit y tenir toute sa place. C’est particulièrement vrai pour les maladies rares, pour des raisons intrinsèques à ce qu’est la France, un grand pays européen, de plus de 60 millions d’habitants, doté d’un système de santé extrêmement performant permettant l’accès de tous, et capable de mettre en place d’ambitieuses politiques à l’échelon national ; Dans le champ des maladies rares, les initiatives de coordination européenne sont nombreuses et la France y tient un rôle de leader. La France coordonne l’Era-net E-rare. En 11 années d’activité, ce réseau a financé plus de 100 projets, pour près de 100 millions d’euros, dans 17 pays. Reconnaissant l’impact de ces actions conjointes, la Commission européenne a proposé la mise en place d’un European Joint Program (EJP) maladies rares, doté d’un financement de la commission de 50 millions d’euros, et c’est à nouveau la France qui prépare la proposition qui sera déposée en 2018, pour un budget total qui dépassera 100 millions d’euros. Celle-ci pourrait regrouper près de 30 pays et la question des infrastructures et de l’interopérabilité des données sera centrale dans sa structuration. Cette position de leader européen, c’est aussi chacun d’entre vous qui doit la porter, en interagissant avec la communauté scientifique européenne et en développant les réseaux qui vous permettent de répondre aux appels à projets européens. Le succès dans l’obtention de financements européens est un des indicateurs sur lequel nous devons faire plus et mieux et votre communauté a une maturité et une expertise qui le lui permet.

Enfin, il existe, particulièrement sur ce domaine, une très forte attente sociétale que la recherche s’articule, efficacement, rapidement avec l’innovation et que tout soit mis en œuvre pour déboucher sur des essais cliniques et thérapeutiques disponibles pour les patients. 

Le gouvernement soutient différents types de projets permettant ces rapprochements. 6 instituts hospitalo-universitaires existent depuis 2010. Certains des très beaux résultats d’Imagine ou de l’Institut du Cerveau et de la Moelle Epinière concernent des maladies rares. Deux nouveaux I.H.U. seront sélectionnés en 2018. Mais plusieurs vagues d’appel à projets Recherche hospitalo-universitaires, (R.H.U.) ont aussi permis de soutenir 29 projets plus ciblés, et remarquables par leur potentiel rapide de valorisation.  Cet effort sera poursuivi avec une quatrième vague pour un montant de 60 millions d’euros. L’innovation nécessite des interactions très fortes entre l’industrie des produits de santé, et la recherche qui peuvent passer par l’incubation de start-up issues de nos laboratoires. Cette présence de jeunes pousses sur nos campus hospitaliers et universitaires doit devenir la règle et nous soutiendrons ces initiatives. Les résultats sont déjà là et les équipes françaises y jouent un rôle de premier plan. Des essais de thérapie génique ont été conduits, notamment par les équipes d’Imagine et ont apporté des résultats dans des maladies dysimmunitaires ou les pathologies du globule rouge et je veux saluer à cette occasion les succès du Professeur Marina Cavazzana, récemment lauréate d’un prix de la Fondation pour la Recherche Médicale pour ces travaux. Notre compréhension des maladies génétiques de la rétine progresse et la collaboration de plusieurs équipes françaises a permis d’identifier les gènes responsables, de comprendre les dysfonctionnements cellulaires en cause et d’envisager des traitements. Ces résultats représentent un formidable encouragement pour la communauté scientifique et les associations de patients. 

La collaboration, l’organisation en réseau, les données massives, l’échelle européenne, l’urgence de la valorisation sont des enjeux qui traversent l’ensemble de la recherche en santé et la communauté "maladies rares" a su proposer des réponses et obtenir des succès. Merci de cela, et soyez assurés de la poursuite de notre soutien.